Title | Socialistes et la guerre européenne 1914-1915 |
Subject | World War, 1914-1918; Socialism |
Creator | Destrée, Jules, 1863-1936 |
Description | Jules Destrée received a degree in law from the Free University of Brussels. He became a member of the Belgian Labor Party in the early 1890s, joining the socialist movement. He was elected to the House of Representatives in 1893, after defending the Workers Union and supporting universal suffrage. He held this position until his death. After Germany invaded Belgium in 1914, Destrée went into exile in France at the request of the Belgian government. From there he traveled to London and Rome, pleading the cause for Belgium. |
OCR Text | Show LES SOCIALÎ5TES ITI‘\ GUERRE EUROPEENNE 1914-1915 LES SOCIALISTES GUERRE EUROPEENNE 1914—1915 Er1ItaH€ avantla guerre (1914-1915) Jules DESTRÉE MEMBRE DE L.\ CHAMBRE DES REPRESENTANTS DE BELGIQUE … AA , ,,_, ,.Kw \,,_., www…. … W WMPM‘AM'W , “1'(>( (_\L{:’Ï\V7‘( —4 '11 _ b’eîîort anglais BRUXELLES ET PARIS IJBRAIRU£ NATIONALE D’ART ET DÎÆŒTO1RE G. VAN OEST & Cie, ÉDITEURS 1916 LES SOCIALISTES IÏT GUERRE I.“— EUROPEENNE Du même auteur: 1911—1913 ,.»… En Italie autant la guerre (19144915) Jules DESTRÊE MÏ.\…IU{ DE I_.'\ CHAMBRE DES REPR1Ï3‘EX'I‘ANTS DE BELGIQÇY: Incessamment : h’efÎort anglais IJBRAIRHÈ BRUXELLES ET PARIS NATIONALE D’ART ET DîîæT0!Rfl G.VAN OESÏ&:CÈ ÜMTEURS 1916 LES SOCIALISTES ET GUERRE LA EU ROPÉENXE NO TES PRELIMINAIRES Cette brochure n’est que l’ébauche d‘un sujet auquel il aurait fallu consacrer un livre. J'ai dû écrire ces notes au cours d’une tournée de conférences en Italie et sans disposer toujours de la documentation qui eût été nécessaire. On y trouvera peut—être des erreurs et certaine— ment des lacunes. Je m’en excuse d’avance auprès de mes lecteurs. Si je me résous a leur soumettre un travail aussi informe, c‘est parce que je crois indispensable d'apporter le plus tôt possible cette contribution, quelque modeste qu’elle soit, a l’éclaircissement de questions brûlantes, essentielles pour la cause du socia— lisme, qui se confond, à mes yeux… avec celle de la liberte et de la justice. J'ai raconté dans : En lia/ic «muni la gm’rr0 (Paris, Van Gest), commentil m'avaitété donné de suivre l'évolution de l’opinion italienne et de constater les hésitations des socialistes officiels a participer ala lutte contre l‘impérialisme allemand. Tout le problème du conflitentre l’idée socialiste et l‘idée guerrière s’est donc présenté la ;l mon obserration et j‘aiété amené a étendre mon enquête aux autres pays. Il importe, en tilet. de connaître bien les faits si l’on veut se former un jugement raisonnable sur ce conflit. Pareil travail a deja été tenté en langue anglaise. Successirunent, .\l. A. W. HUMPHREY. dans lu.“rrmzliwml.wrz‘aiirnz and 1115 tom [London. King .;m/ «nul et .\l. WiLLIAM ENGLISH \VALLING, dans l}/'f multi/tts run] the rear [New York. Holt] ont publié des études du plus haut intérêt qui monde en présence de la guerre européenne, il importe de préciser d’abord, dans la mesure du possible, les forces respectives des partis socialistes dans les divers pays belligérants et neutres. Il est évidemment malaise’ de dresser une pareille statistique d‘une façon rigoureuse. Les bases d’appréciation font parfois défaut et il est permis de supposer que celles qui sont indiquées par les partis eux-mêmes ne sont pas toujours absolument exactes. Néanmoins, on peut arriver a une approximation suffisante en comparant deux séries de chiffres. La premiére est celle des membres cotisants des organisa— tions socialistes, la seconde est celle des suf— frages obtenus dans les scrutins électoraux. Voici ce double tableau d’aprés M, W. HUMPHREY : I° RELEVÉ DES AFFILIATIONS nir—ut été d‘un précieux secours. !: .\\‘.illl de poursuivre l'examen de l’at titude ultr}‘lcc par les différents partis socialis tes du Sociale démocratie allemande ...... Sociale démocratie autrichienne \ Sociale démocratie tchèque—slave Parti socialiste italien .......... . . Sociale démocratie serbe .......... 970.112 289624 40.000 3.000 ——8— ….ÿ _… Parti socialiste français .......... 80.000 doctrines socialistes ou sensibles à leur in— Sociale démocratie russe ......... Parti socialiste révolutionnaire. . . . 168.000 fluence ne sont point comprises dans les sta— inconnu tistiques ci-dessus. Il est certain, d’autre part, 222.000 L539.092 que, dans ks pays non contpfis dans ces ta- Parti ouvrier belge ............. Parti ouvrier anglais .......... Parti socialiste anglais ........... 20.000 bleaux, et notamment aux États-Unis, en Hollande, au Danemark, en Suisse, en Roumanie, " Pouces LLL‘C'I‘ORALES DES DIFFERENTS PARTIS existent des partis socialistes qu’il convient de ne pas oubber. tha sous ceüe doulde .) 51‘l1‘i'afges émis , Âllemagne...a 250.329 (1912) .‘ Autriche .. ‘ i . .. 1 .oc0,ooo ) (1911) Nombre des députés Nombre total socialistes du parlement des membres développenaent,et silcst vnfi.que ce dévelop110 397 82 )16 ' ini… ........ ,;s.se; (1909) 42 508 bei'bie ....... 25 .000 (1912) 2 166 lranCc ...... i…;00.000 (1914) !… \!L‘ ...... Ëîel;‘l}jUC. _ . … r \ — a‘et.tune. ,, _ ……_ 800.000 (1912) téserve,lesstaûsûques nous prouvent queles nations engagées dans la guerre sont celles où le parti socialiste avait acquis son principal 110 ‘ 595 442 600.0…) (1312) 39 185 “» .602 ‘ ,,c °°m (1912; 42 6/0 " \\ Il n est pas contestable que ces tableaux ne itpresentent point complè tement la force de l]tltt socialiste darts le monde. Il est certain, n .AU1I'e part, que dans l es pays recensés, un grand nombre de personnes favorables aux pement est, en général, l’indice d’un état avancé de civilisation, il faudrait reconnaître que l’Allemagne et l’Angleterre viennent aux premiers rangs. Il est impossible de ne pas être frappé de l’extraordinaire puissance électorale de la sociale démocratie allemande et du nombre imposant de ses représentants parlementaires. Au— cun autre parti socialiste au monde n'avait la puissance politique de celui-là. Il semble, dés lors, qu’il soit d’autant plus coupable de n’avoir pas eu le courage d'en user pour exiger de son gouvernement une a- 10 …. ti politique conforme aux principes au nom desquels il s'était constitué. Ces difiérents partis socialistes n’avaient sans doute pas une doctrine arrêtée dans les Congrès mande, il a partout loyalement exécuté ce programme et répondu aux espérances qu:il avait suscitées. On est injuste pour le socialisme international lorsqu’on se refuse a lui reconnaître une action dans le maintien de la paix européenne international de Stuttgart sur une double antérieurement au mois d’août 1914. On doit details au sujet de la guerre. Toutefois, ils avaient pu se mettre d'accord au indication : le devoir socialiste devait être, selon la décision du Congrès, de faire, dans l‘éventualité d‘une guerre, l’efl’ort maximum pour empêcher celle-ci et, une fois la guerre déclarée. de faire tout le possible pour amener la paix. ll est donc tout a fait faux de croire, ainsi que les réactionnaires se plaisent à se l‘imaginer. que le parti socialiste international ait jamais en l’illusion de pouvoir désormais empêcher toute guerre. Au contraire, il avait prévu que l’organisation capitaliste moderne, avec ses luttes inévitables pour la conquête des marchés du monde. aménerait un jour les nnpérialismes et les nationalismes des diffé— rents gouvernements à entrer en confl it. Le socialisme se promettait seulement de lui fair e obstacle dans la mesure de ses forces et l’on petit dire que, sauf la défaillance austro-alle— au contraire raisonnablement croire que s’il n’avait pas existé, le fléau se serait déchaîné plus tôt. La vérité est qu’il s’est trouvé impuis— sant devant des fatalités qu’il avait lui-même dénoncées et il est véritablement absurde d’essayer de le rendre responsable d’un cataclysme que, dans la mesure de ses forces restreintes de parti d’opposition, il a tout fait pour empêcher. CHAPITRE PREMIER DANS LES PAYS BELLIGERAX‘TS [ BELGIQUE J’ai naturellement commencé mes investigations par la Belgique, et plutôt que d’exposer une manière de voir purement personnelle, j’ai préféré demander leur opinion à deux de mes amis, MM. Émile Vandervelde et Émile Royer. La pensée de M. Varadervelde ofl're un double intérêt. Il est, en effet, non seulement le leader du parti socialiste belge et ce qu’il dit est l’avis même de l’unanimité du parti, mais il est aussi président du Bureau socialiste international, et a ce titre, ses paroles ont une portée toute particulière et s’im— prégnent d’une réserve que la plupart des socialistes belges ne s’imposeraient probablement pas. On sait que M. Émile Vandervelde a été, dès les premiers jours de la guerre, appelé à faire partie du gouvernement en qualité de Ministre d’État. C’est là une fonction mal définie encore et qui était jusqu’ici purement honorifique. Les Ministres d’État _. r_j — étaient les hommes politiques que le Roi consultait dans les moments difficiles. En fait, dans la période présente, les Ministres d’État ont été associés au Gouvernement. mais il ne leur a pas été attribué dedépartemcnt spécial. Leur influence a été considé— socialiste d’ailleurs, à la sociale démocratie d’Allemagne ? Que ne devons—nous pas aux penseurs allemands Engels, Marx et Lasalle ? « Quand on connait bien les origines, ne peut—on rable et leur collaboration à l’œuvre de défense natio- la sociale démocratie allemande ? « Quant à la prétendue entente préalable entre nale constante. C’est ainsi, notamment, que M. Vandervelde a été unvo_vé en Angleterre pour faire connaître aux réfugiés belges qui s’y trouvaient leurs obligations invers la patrie. Les journaux allemands se sont moqués de lui en l’appelant le sergent recruteur du Roi et il a fièrement accepté leurs sarcasmes, per— suadé qu’en contribuant à défendre son pays, confor— mément au droit et a l’honneur, il accomplissait un devoir sacré qui n’avait rien d’incompatible avec ses convictions socialistes. Î\l. Vandervelde s’occupe, à Londres, avec un zèle extreme, de tout ce qui concerne les soldats belges (cnrolement, soins aux blessés, situation des réfor— mes. etc.), et il a bien voulu nous fair e les déclara— izons que voici : <\ —— S‘il était un pays qui pouvait à just e titre se déclarer hostile au milit arisme et montrer toute son horreur pour l a guerre, c’était la Belgique, qui avait avec tous les pays voisins les meilleures relations Ll.‘r…lllC. Dans la partie fi ama nde du pays, beaucoup dL' BL lgcs svm pathisaient de préf érence avec l’Alleiii;igiié. Que ne d evons— nous pas, au point de vue pas dire que le socialisme belge est le fils légitime de l’Angleterre, la France et la Belgique, au sujet de cette guerre, je déclare formellement que c’est abso— lument faux, et l’on peut ajouter que le Gouverne— ment conservateur belge penchait plutôt vers l’impé- rialisme allemand que vers la République athée et démocratique de France ou vers les hérétiques d’Angleterre. « Si donc il y a eu un cas de légitime défense, c’est bien celui de la Belgique attaquée en violation de toutes les règles du droit et de la justice. « Aussi la résistance a été unanime, et l’unité morale du pays s’est faite sur une question d’hon— neuf. « Et il est intéressant de constater que chez les socialistes belges, ceux qui étaient les protagonistes de la politique révolutionnaire du parti, ont donné l’exemple, en s’enrôlant comme volontaires des le début de la guerre, notamment Louis de Brouckère, à la Compagnie des aérostatiers, et Deman, qui de simple soldat est devenu sous—lieutenant. Tout le monde, sans exception aucune dans le parti socialiste, a compris son devoir. » —-I6—— =._1/—— « —— Et c’est ainsi que vous êtes entré au Gouver— nement? Vous savez que les socialistes allemands vous reprochent d’avoir accepté de faire partie d’un cabinet clérical ? « —— le le sais, et cela m’importe peu, répondit \’andervelde. Vous pouvez donner votre témoi— gnage de l’adhésion entière du parti ouvrier a mon attitude. Les adversaires les plus acharnés de la participation au pouvoir eux-mêmes m’ont félicité et encouragé. L’incident ne préjuge d’ailleurs en rien l’avenir; il est né des circonstances exceptionnelles qui se sont présentées et, après la guerre, le parti se retrouvera entièrement libre de continuer ou non une politique de collaboration nationale. « {Et je rappelle que notre ami Deiardin, député ouvrier de Liège, a été nommé par le roi bourg— mestre de sa commune. Dejardin est le premier bourgmestre socialiste ; il a eu sont ceux qui ont donné ces ordres de terrorisation qui sont responsables des crimes irréparables qui ont été commis. » << —— Depuis la guerre, n’avez-vous pas eu de nou— velles des « genossen » allemands? « ——A plusieurs reprises, des socialistes allemands sont venus à la Maison du Peuple de Bruxelles et l’un d’eux a demandé pourquoi les Belges n’avaient pas laissé passer l’armée allemande. « Lorsque les socialistes belges ont répondu que c’était, pour la Belgique, une question d’honneur, le une attitude si courageuse que les Allemands l’ont arrété dix—sept lors de suite. Cette nomination-là, elle aussi, a ren— contre lapprobation générale, tant chezles socialistes que chez les conservateurs. ») ’ ’ M. \'andervelde continua : > ‘<‘ —— Beaucoup de social rstes croyaient de bonne loi que l’armée allemande, qur est composée pour un tiers au _ moins de democrates soc ialistes, se ran dune façon humain e. mands, a tel point qu’on peut dire que jamais un pays n’a été traité comme le nôtre. « Mais ces crimes ont été commis ou bien à la suite d’ordres implacables, dans un but de terrorisation, ou bien par des brutes avinées lâchées dans les villes et villages de notre malheureux pays. Et ce condui— «\ Certes, Je ne rends pas le peuple allemand res— ponsable des crimes qui on t été commis par les All e— socialiste allemand a répondu que l’honneur est une question d’idéologie bourgeoise ! « Il est inutile de dire, ajouta Varadervelde, que je ditÏère absolument d’appréciation a cet égard, et qu’il est hors de doute que le respect des signatures doit valoir autant pour les ouvriers que pour les bourgeois. » « — Mais en dehors de l’intérêt, n’avez—vous pas eu des raisons plus générales? « — Si, notre attitudeaété déterminée par d’autres motifs qui intéressent l’Europe et le monde. La neutralité belge n’était pas seulement un avantage pour 2 -..… 18 _. nous Belges, mais une garantie pour nos voisins : pour l’Allemagne, si la France envalrissait la Bel— gique, et pour la France, dans l’hypothèse ou l’Alle— magne cmalrirait notre pays. Si donc, par pusillanimite', contrairement aux engagements pris, nous avions laissé passer les armées allemandes, notre complicité leur eût permis de poignarder la France et d’écraser la démocratie de l’Europe occidentale. « Et c’est ici qu’apparait la communauté d’inté— rêts entre les démocraties de l’Europe entière. « Voyez à ce point de vue la conférence de socialistes alliés qui eut lieu, en février 1915, à Londres et l’ordre du jour voté. « Beaucoup de personnes qui n’ont pas assisté a la séance ont trouvé que cette résolution était vague et nnprécise. « Certes on aurait pu obtenir un vote de simple maioriié. sur un texte nettement d’accord avec nos sentiments, mais ne valait-il pas beaucoup mieux obtenir l’unanimité de toutes les opinions socia— listes représentées, depuis les moins avancées jusquaux partis les plus révolutionnaires, sur deux points essentiels de principe : I° la guerreà outrance pour s:nncre l’impérialisme allemand, et 2° pour aboutir à une paix qui soit solide et qui garantiss€ aux peuples le droit de disposer d’eux-mêmes. « Les motifs donnés dans cette conférence pour nrçner énergiquement une lutte de defense contre lmrperralrsme germanique valent pour tous les peuples qui ont à se plaindre de l’annexion par force. » « —— Même pour l’Italie? Vous n’ignorez pas le neutralisme systématique de nos amis? « Lors de la guerre de Lybie, contrairement aux sentiments de certains de mes amis, j’aipris la parole, à Milan, contre la guerre, parce qu’il s’agissait à ce moment d’une guerre de conquête. Mais il n’en est pas de même dans le conflit actuel. Il s’agit ici d’une guerre de légitime défense, d’une guerre contre la guerre, d’une guerre qui doit être vicrorieuse pour créer une Europe dans laquelle il n’y aura plus de populations annexées par force, dans laquelle les peuples auront recouvré le droit de disposer d’eux— mêmes. « C’est à nos amis d’Italie à savoir si, dans une pareille guerre, la neutralité est une possibilité ‘. » Voici maintenant l’opinion de M. Émile Royer, député socialiste deTournai,qui collabore, à Londres, aux eflorts de M. Vandervelde. Il vient de publier une brochure extrêmement intéressante et documentée : Les Social démocrates allemands et austrabongrois et les Socialistes belges [Ed. du Coin de France, Londres]. Un correspondant de l’Indépendance belge lui ayant demandé si l’avenir de l’Internationale Ouvrière ne lui semblait pas gravement compromis, il répondit !. Les déclarations étaient faites avant mai 1915. (lual‘pmdunrr ltelgc du 17 levrter 1915) : « Vous tou— chez la, mon cher ami, a l‘un des côtés les plus dou- loureux de l‘incommensurable catastrophe {je n‘ai jamais occupé aucune situation dans l’Internationale et je vous prie de considérer que mes propos n’en— gagent que moi): la seconde Internationale ouvrière a fait faillite et l’on eswtyerait en rain de la ressusciter dans le même esprit qultuttmlois Les militants dela sociale démocratie nous sont devenus absolu— ment odieux. Qui donc pourrait leur pardonner de se… tus au Reichstag quand le Chancelier de l‘Empire déclara cyniquement, a la séance historique du 4 aout, qu‘en violant la Belgique, l‘Allemagne agis— sart cn opposition avec le droit des gens et commet— tnt une iniustice ? Ne sera—ce pas une éternelle pontepour le chefdu groupe socialiste au Reichstag, ,c citoi‘eirl—iaase, d’avoir lu, au nom de ses collègues, l;i“_il_lufumr.lî rote des crédits de guerre, une t.…aianon qui etait le contrepied du discours que le meme Haase avait prononcé moins d’une semaine aupanuant au meeting du Circ ne fit ' Je A‘ « îd. il IC} était avec force : « l'Autriche \—Îi_ï\lanîjîieîïg @ Dts‘ socialistes pourraient—ils, si les circonstances ne se mpdtlnnt pas profondément, fraterniser encore arte tze'pietendus camarades qui ont laissé commettre … Belgique les plus abominables atrocités sans protester et presque en y applaudissant? Ah! il ne Sell_“fi l‘ilS, pour que tout cela s’oublie, que les «mal démocrates se remettent à invoquer les prin- ciem— cipes du socialisme international et jouent, cons le leur ment ou inconsciemment, le rôle qui semb entourage avoir été réservé par l’Empereur et son passé. pour le jour où le temps des vantardises sera savons Nous nous garderons d‘être leurs dupea nous et c’est aux actes ce que vaut la parole d’un Allemand, il y aura seuls que nous pourrons reconnaître quand s du liste quelque chose de changé chez les socia Kaiser. « Depuis longtemps, le socialisme allemand m’était usiveantipathique, les marxistes s’attachaient excl Dans ment au côté matériel des questions sociales. triomphe; l’Internationale ouvrière,ce marxisme avait la tradide plus en plus le socialisme s’éloignait de humani— tion révolutionnaire francaise. Les idées hommes taires des hommes de la Convention et des noble de 1818 étaient de‘daignëes. C’est pourtant cette elle , tradition qu’il faudra reprendre. Heureusement socialistes était assez vivante encore dans le coeur des si— francais et belges pour que, sans une minute d’lié e— l‘All tation, ils aient compris que se battre contre et magne, c’était lutter pour la liberté du monde pour les idées de liberté et de fraternité. … 31 ") valurcnt des persécutions de toutes sortes et des années de prison, Tous ces élans généreux devançaient par trop Il l’état présent de la civilisation et ne tenaient pas compte de ce que tous les peuples n’étaient point arrivés au même stade supérieur. Or une nation ne peut s’isoler, FRANCE même dans sa supériorité, et les nobles ambitions La posmon du socialisme français à l’éoard de la U z?uerr e actuelle est extr" emement simple. Elle° échappe‘ { tpute critique , elle est, avec la Violation de la neu— ra rte en moins , la meme belge_ 3 q ue celle du s ocral ' ' tsme a . . . ‘ Aucu m0iS dinparn' du monde n’a fait, ' antérieurement au …en atout I9I4,une propagande plus active et plus à ]… ll.ubâf1I€ en faveur de la paix. Un seul nom sufiit cours ' toute -. celu1' de Jean Jaurès cv oquer dont le dismagntfique prononcé sous les voûtes de la cathédrale de E’] ’ me' de l ’ effort de toute «1 € éta1' t le resu sa vie. (. est de France et s é—' . . . franc P Halement du parti socralrste tarisme et pour ar .Cfgiques pour combattre le mili— internatio 1 , river, par les vores de l’arbitrage na ) au _d€Sarmement général. On , FÎ)Ë—Éfîl$ scandalî les trouver excessives et crier au tissanteS ,Proclampd‘5 OUbllfê, par exemple, anons retende Gustave Hervé,les qui lui pacifistes de la France n’aboutissaient malheureuse— ment qu’à la déforcer vis—à-vis d’ennemis moins sou— cieux d’idéal. A la veille de la déclaration de guerre, les socia— listes français se rendirent à Bruxelles au grand mee— ting convoqué par le Bureau socialiste international et y rencontrèrent des délégués des différentes nations. Un grand souffle de fraternité paraissait ani— mer tous les coeurs et ce fut encore la grande voix de Jean ]aurès, qu’on entendit ce soir-là pour la dernière fois, qui exprima les espérances unanimes. A ce meeting assistaientégalement des Allemands et notamment le citoyen Haase, leader du groupe parlementaire. Il s’associa sans réserve aux démonstrations en faveur de la paix et les socialistes français purent croire que l’action socialiste serait parallèle dans les deux pays. Un appel du parti socialiste français a la popu— lation, qui fut affiché dans les grandes villes de France, reflétait encore cette opinion dans la dernière semaine de juillet. Aprés avoir constaté que l’anarchie fonda— mentale de notre systeme social, la compétition des groupes capitalistes, les visées coloniales avaient créé en Europe un risque de guerre constant etcroissant, risque accru soudainement par les procédés agressifs de la diplomatie austro—hongroise, l’appel demandait atous les travailleurs de s’unirpour empêcher l’abo— minable crime qui menaçait le monde. Il ajoutai t : « _loignons nos efforts a ceux de la sociale démocr a— tie allemande qui demande a l’Allemagne d’exerc er une influence modératrice sur son alliée l’Autri che », et dans son article quotidien del’Hzmzmzild, Jean Jaurès voulait encore croire, le3 I juillet, que la situation n’était pas désespérée. Le soir de ce 31juillet, Jean laur’es était assassiné. Lelendemain, un délégué du « Partei Vorstand » de Berlin, acco npagné du secrétaire du Bureau socialiste international, vint trouver les socialistes français et eut avec les membres du groupe parlem entaire deux entrevues successives, l’une à la Chamb re des députés, l’autre dans les bureaux de rédaction de l’Huma— nité. Sernbat insista sur l’importance de l’unifor— mité des attitudes en Allemagne et en France ; il rappela ce qu’avait dit Haase à Bruxelles et proposa une brève déclaration commune, à lire dans les deux parlements pour justifierle refus de voter les crédits de guerre. L’Allemand répondit qu’il était venu en toute hâte a la suite d’une décisio n d’une fraction du parti, le groupe parlementaire n’étant pas encore au complet. Mais tous les présents avaient exprimé le dcsn' d’un vote identique dans les deux pays. L idee de la declaration comm une lui plaisait, mais elle lui semblait difficile à réaliser, faute de temps. « En tou/cas, déclara-t—il, un vote affirmatif est exclu. » Renaudel fitremarquer que si l’Allemagne attaquait la France et violait le territoire d’autrui, les socia— listes français se tr0uveraient dans l’obligation de voter les crédits nécessaires à la défense nationale... Le délégué allemand confirma son accord et ses déclarations antérieures. Le jour où les négociations diplomatiques furent rompues entre l’Allemagne et la France, le groupe parlementaire socialiste français avait encore fait une démarche instante auprès de M. Viviani, président du conseil, pour réclamer un suprême effort en faveur de la paix. L’agression de l’Allemagne surprit donc, comme un coup de foudre, et l’attitude des socialistes alle— mands, si contraire aux tendances du parti, si absolu— ment opposée à leurs promesses formelles, causa une douloureuse stupeur. Mais obligés de deilndre leur pays contre cette attaque soudaine et contre l’invasion, les socialistes français se serrérent sans hésiter amour du gouvernement et le parti, après une délibération réfléchie, autorisa deux de ses membres, Marcel Sembatet jules Guesde, a faire par— tie du ministère. L’abnégation patriotique avec laquelle ils acceptèrent cette charge est d’autant plus remarquable que dansle cabinet figuraient Mi\'l. Brian d et Millerand, deux socialistes d’autrefois, que l’on avait àprementet personnellement combattus __o—__ “/ —— 26 »— Il est à signaler encore que M. jules Guesde est le plus autorisé des défenseurs de lidee marxiste en . France. L’Hummzftñ, au nom du groupe parlementaire socialiste, expliquait que le parti avait cru devorr s’associer au gouvernement dans un momennou l’avenir de la nation, la vie de laFrance étaient enjeu, dans un moment où les armées de France se trou— vaient passagèrement forcées de battre en retraite devant des forces supérieures, laissant sous la menace de l’ennemi l’un des districts les plus riches et les plus industrieux. La nation tout entière devait se dresser pour la défense de son sol et de sa liberté. . Et jean Longuet faisait remarquer qu’il était extraordinaire de voir que la France devait être sauvée du joug étranger, par l’intelligence, l‘initiative et le courage—de ces « antipatriotes », de ces « amis de tous les pays sauf le leur », ainsi qu’on désignait les mentaire. Et l’on vit enfin Gustave Hervé, l’antimilitariste intransigeant d’autrefois, comprendre, avec une mer— veilleuse lucidité, qu’il fallait des raisonnements nouveaux à une situation nouvelle. Il reprit la tâche abandonnée par jean Jaurès, et, par ses articles quotidiens dans la Guerre sociale, for— tifia les courages et exalta l’action. Il est, à l’heure présente, l’un des écrivains les plus lus et les plus écoutés, et son clair bon sens, son élan patriotique, sa direction toujours démocratique rappellent les grands révolutionnaires de 1792. Ainsi, tous les éléments du socialisme français, sans rien renier de leurs anciennes convictions, se sont associés, avec une commune ardeur, à l’oeuvre Leurs indispensable du salut public. Leur action dans la guerre a fait l’admiration de tous, en France et au dehors Elle nous permet d’espérer que leur action, quand sera venu le moment de la paix, s’inspirera encore des plus nobles sentiments de la démocratie et du socialisme. Nous ne croyons pas pouvoir mieux terminer cet exposé des opinions du socialisme français au sujet de la guerre, qu’en publiant le texte complet de l’ordre du jour voté à l’unanimité, par le Conseil National du parti, le 14 juillet 1915. Le document est la conférence de Londres, un peu long, mais il confirme et précise, d’une façon socialistes. Les ministres Sernbat et Guesde, par une innovation assez hardie, se tinrent en relations constantes avec les membres du parti et leur rendirent compte de leurs actes au ministère. Leur conduite fut perpé— tuellement approuvée. Parallèlunentà l’action du socialisme unifié, les groupes se rattachant à la Confédération générale du travail, s‘associerent, presq e tous, avec la même (.iti'pie, a l’oeuvre de défense nationale. dulégués assistérent a en février 1915, en même temps que Sembat, Vail— lant, Longuet et d’autres membres du groupe parle- … :s ——- « Le parti socialiste français, réuni en son Conseil é la National le 14 juillet 191}, après avoir examin et situation créée par l’agression austro-allemande lcsonze mois de guerre qui en ont été la conséquence, e— se lilicize de constater que ses fédérations, naturell ment aliaiblies par la mobilisation et les deui's de la guerre, reprennent cependant toute leur vitalité d’action. << Il affirme ;‘t nouveau sa confiance inébranlable dans la cause des alliés et de la France républicaine. « Il rappelle qu’à l’heure ou se nouait le vaste con— llit dans lequel se débat le monde, il a fait appel, jus— qu’au dernier moment, a toutesles forces de paix, en pe—ant surle gouvernement français dont il constatait, ds le 2% j illet 191j, << le souci très net et trés << sincère d’écarter ou d’atténuer les risques du << contiit ») en lui demandant << de s’employer 51 << laire prévaloir une procédure de conciliation et de << nrÇdia‘ionrcndueplnsFacileparl’empressement dela << Se‘bie a accorder une grande partie des demandes << de lAutriclte. << lin réclamant, le 29 juillet, qu’aucune interven— tion annie de la Russie ne fasse liftti\‘ement << le jeu << du gcriiiatiisine impérialiste le plus agressif qui ,… << jour se retourner contre l’abus qu’il fait de la force « brutale ». « Il rappelle qu’à la mêmelteure, la section socia- liste autrichienne fixait ainsi la responsabilité du gouvernement austro—hongrois : << Nous ne pouvons << accepter la responsabilité de cette guerre, respon<< sabilité que nous rejetons ainsi que toutes les con« séquences terribles qu’elle peut produire. sur ceux << qui ont imaginé, accompli la démarche fatale qui « nous met en face de la guerre» (Ultimatum a la Serbie). « Il rappelle encore le jugement de la section socialiste allemande au même moment: << Si nous condamnons les menées du nationalisme < pauserbe, la légèreté de provocation a la guerre du « gouvernement austro-lrongrois suscite notre plLL < énergique protestation. Les exigences de ce gou— « vernement ont une brutalité qui ne s’est jamais << vue encore dans l’histoire du monde a l’égard d’une << nation indépendante et elles ne peuvent être cal— << culées que pour provoquer la guerre. Le prolé— << tariat conscient d’Allemagne au nom del’laumanité << et dela civilisation élève une protestation enflam<< tuée contre les criminelles intrigues des fauteurs de I‘\ é d’être intéressante, les directions qui n’ont cess cement celles du socialisme français depuis le commen de la guerre. .…29 << guerre. Il exige impérieusement du gouverne- << tuent allemand qu’il use de son influence sur le << seriillt- axoir cherché son heure pour une entre- << gouvernement autrichien pour le maintien de la << paix et si l’horrible guerre ne pouvait être empê— prise de violence sans précédent. qu’il verra un << cl1ée, qu’il ne se mêle en rien du conflit. Aucune _._ ; () _… « goutte de sang d’un soldat allemand ne doit être Rosa Luxemburg, Ledebour, Mehring, viennent se « sacrifiée aux pensées ambitieuses des gouvernants joindre la vigoureuse allimation de Haase, Bernstein « autrichiens, aux calculs de profits de l’impéria— et Kautzl;y et la manifestation dite des deux cents « lisme. » fonctionnaires devenus aujourd’hui plus de mille. « Ainsi, dès son origine, le parti socialiste français peut dire que toute responsabilité immédiate était « Ainsi s’opère dans le socialisme allemand lui— même l’examen qui s’impose aux socialistes de chaque écartée de la France, de l’aveu même de tous, elle nation, pour déterminer ses responsabilités et son l’était plus encore par les promesses que le parti socia— liste obtenait du gouvernement, associé à l’Angle— terre et suivi par la Russie, de prop05er une procédure de médiation et d’arbitrage. « Elle l’était enfin par les mesures destinées à éviter tous incidents de frontière, par l’engagement pris de subir une déclaration de guerre, mais de ne pas s y assoc1er. « La guerre éclatait, déclarée par l’Allemagne, comme elle avait été déjà déclarée ailleurs par l’Au— devoir vis-à-vis des gouvernements comme vis-à—vis de l’lnternationale. seil national considère qu’il ne saurait y avoir de paix durable si celle—ci n’est pas basée : « I° Sur le principe des nationalités, impliquant a la fois la volonté d’écarter toute politique d’annexion, et le rétablissement du droit qu’ont les populations opprimées de l’Europe à disposer d’elles-mêmes et a faire retour à la nation dont elles ont été brutalement triche. séparées ; « Et le mondeapprenait la violation de la neutralité du Luxembourg et de la Belgique. « Sans hésitation, à l’unanimité, assuré du droit de la France, de sa volonté pacifique, le groupe socialiste \‘opiit au Parlement les crédits pour la défense natio— na e. « Le conseil national approuver cette décision qui klllpL)l'l”fllî ÎOUÎCS 3UÎÎG S. « le conseil national salue le réveil de conscien ce qui se produit en Allemagne, par lequel, aux pre— nueres protestations de Liebknecht, Clara Zetkin, « Aujourd’hui, après onze mois de guerre, le con- « 2° Sur le respect absolu de l’indépendance poli— tique et économique des nations ; « 3° Sur l’organisation de l’arbitrage obligatoire entre les peuples permettant à la fois lalimitation des armements, lecontrôle démocratique des engagements pris par chaque gouvernement, et la constitution d’une force internationale de sanction. « Pour obtenir ces résultats et pour chasser du monde les rêves exécrables d’une hégémonie qui aboutirait a placer l’Eur0pe sous le talon de l’impérialisme le plus brutal, le plus agressif etle moins scru— 53'“ _32_… «< C’est une fièvre d’activité ardente qui doit emporter ce pays à l’intérieur pour se réfléchir au front en une vigueur irrésistible. « Donner au soldat sa pleine sécurité morale, le convaincre avec évidence qu’à l’heure où on lui demande sa vie même pour l’idéal et le salut commun, les siens sont hors du péril, de la misère, exiger puleux, le parti socialiste se déclare prêt a nouveau a continuer son concours sans réserves, comme sans défaillance ni lassitude a l’œuvre de défense nationale. « Il sait les deuils, les douleurs immenses engendrés par la guerre. … Il sait qu’ils ne peuvent disparaître du présent comme des préoccupations de l’avenir que si l’impérialisme allemand est vaincu. « Il poursuit avec l’ensemble du pays et de ses alliés la libération des territoires de l’héroïque et lo_vale Belgique et des régions envalties de la France ainsiquela réparation du droit pour l’Alsace—Lorraine. « Mais pour atteindre ce résultat, nous pensons encore que toute tnollesse doit être bannie. Chefs et soldats doivent être animés d’une foi ardente en la vies de la nation en armes, à veiller que l’élan des soldats méme ne soit pas brisé par les mesures qui seraient en contradiction avec l’esprit de la pattî€ rt*publicaine, avec Cttté glorieuse tradition d’égalité et de liberté que les citoyens français ne veulent pas \“on‘ périr même par l’effet d une discipline proclamée par nous nécessaire, infiexible dans son équité. Nm ...—…:.“— —.—-…aw....…. . -. … de salut, a contrôler l’organisation de tous les ser— ventions. .-« si le Parlement, puisqu’il est la suprême émanation du pa_vs, est appelé à surveillerl’exécution des mesures taires, fournisseurs aussi qui ont charge, a quelque titre que ce soit, d’une parcelle de la défense nationale, l’exécution la plus stricte du devoir et des con- «...s—.»— victoire. « Cette foi, ils l’auront si le gouvernement donne aux uns et aux autres les moyens matériels de vaincre, de tous ceux, officiers, fonctionnaires civils et mili- « Prévenir les insuffisances et punir les fautes sans hésitation, sans défaillance, ni complaisance. « Susciter partout l’énergie productrice de la guerre. « Remanier s’il le faut le principe duquel les auto— rités militairestiennent un pouvoir exclusif pour l’organisation de cette pratique de méthodes de bureaucra— tie qui ne sont plus en harmonie avec l’industrie et le travail modernes ni compatibles avec la rapidité des résultats obtenus. « Créer des usines nouvelles si les anciennes ne suffisent pas. « Voilà ce que nous réclamons du gouvernement comme le gage certain et rapide de la victoire. « Le parti socialiste pense encore que le gouverne— ment de la France s’honorerait devant l’humanité si, des horreurs même de la guerre, il faisait surgir la lueur qui conduira le monde a la paix. « Que, dès maintenant, il propose a ses alliés d’ac— cepter l’engagement solennel de soumettre, à l’avenir, tous les litiges qui pourraient se produire entre ces nations à une procédure d’arbitrage international. « Qu’il fasse appel à tous les neutres mêmes pour s’associer à cet acte. … Qu’on garde la porte ouverte à toutes les nations qui l’accepteront. « Si une telleinitiative est suivie d’effet, la France, une fois de plus, aura mérité de la reconnaissance du monde pour sa volonté de paix, pour la liberté des individus et des nations. « En conséquence, le Conseil National, se référant à la déclaration de Londres et confirmant la résolution votée le 7 février dernier par la conférence des secrétaires de fédérations. « Constate à nouveau devant le monde socialiste que la France ne porte pas laresponsabilité du conflit qui a déchainé sur l’Europe le fléau d’une guerre générale ; « Qu’elle n’a fait que se défendre contre une agression préméditée de l’impérialisme allemand, qui pour atteindre son but n’a pas reculé devant la violation de la Belgique; « Déclare que la lutte imposée aux alliés par les dirigeants de l’Allemagne doit être conduite à 5011 terme logique, c’est—à—dire jusqu’à la défaite du militarisme allemand, afin que soit donnée au monde la grande et nécessaireleçon d’une entreprise d’hégémo- nie brisée par la résistance des peuples libres ‘ J « Que de cette guerre — et pour qu’elle soit la derniére — doit sortir une Europe fondée sur le respect des traités et l’indépendance des nationalités, où les peuples ayant recouvré le droit de disposer d’eux— mêmes pourront enfin rejeter le fardeau écrasant du militarisme. « Répudiant à la fois toute politique de conquête au delà des restitutions légitimes et toute pensée de défaillance devant l’invasion, « Approuve à nouveau l’action menée depuis le début de la guerre par la commission administrative permanente du parti et le groupe socialiste parlemen— taire et leur donne mandat de poursuivre dans le même esprit de fermeté inflexiblel’œuvre de défense nationale. » HI ALLEMAGNE Après plus d’un an, l’attitude du parti socialiste allemand reste injustitialfle et même inexplicable ‘. Nous avons rappele antérieurement le meeting so— ciali>te international convoqué à Bruxelles et les dis- cpurs qui _v furent prononcés, notamment par le citoyen Haase, leader du groupe parlementaire de la sociale démocratie. Nous avons rapp«lé aussi les dé— marches qui furent taires auprès des socialistes français dans les tout dernhrs jours de juillet. Ces dé— marches étaient en accord avec un manifeste publié des les premiers symptômes de la confiagration europe: une, le 25 juillet 1914, par le parti socialiste allemand. Au nom de l’humanité et de la civilisation, re manifeste appelait le prolétariat d’Allemagne à une énergique protestation contre la criminelle entreprise des lauteurs de guerre. Il demandait au gou\ l, temps de paix, vous méprisent et vous exploitent, veulent faire de vous de la chair à canon. Chacun doit répondre, en criant de tout son pouvoir : Nous ne voulons pas la guerre ! a bas la guerre ! longue vie à la fraternité internationale des peuples ! >> Ce qui est tout au moins étrange, c’est que ces meetings eurent lieu. On en compta, dans la soirée du 28 juillet, vingt—huit a Berlin. Ils furent autorisés et même protégés par la police. A en croire les correspondants berlinois du T/Je 71er S/a/usmmz et du AJam/aur/vr Guard/an dont le témoignage a été Confirmé par une lettre du compagnon Sweden a Rarnsay.\lac Donald,un personnage important de la sociale démocratie, Haase. fut appelé, le matin même du jour où ces meetings .. . » a. ce sujet ,.__ fruit, l: cons..ltua .i\ec ytp, : Emzlu Royrr, Les devaient avoir lieu, au ministère, et il y fut averti, );linhl…t\ allemands et austro—hongrors et les SOc1ahstes rendus. l:dition du Coin de France. que non settlement ces meetings ne seraient pas inter— dits, comme le demandait la presse réactionnaire, mais. qu’au contraire, toutes les mesures seraient _ t> 4 1 vernement allemand d’user de son influence auprès du gouvernement autrichien pour la conservatiOn de la paix, et si cette guerre honteuse ne pouvait être évitée, il le priait de s’abstenir de toute intervention armée ; aucune goutte de sang d’aucun soldat alle— maud ne devait être sacritiée pour les visées ambi— tieuses et les profits impérialistes de l’Autriche. Il convoquait tous les compagnons a des meetings devantsignifier la volonté du prolétariat allemand de maintenir la paix. « Les clases dirigeantes qui, en e…; i... Le groupe soc1alrste au Rerchstag et la journefi un :. aout. Paris, Colin. *“39‘ prises pour empêcher qu’ils ne fussent troublés. Le fonctionnaire engagea même le socialiste à poursuivre sa propagande en faveur de la paix avec une éneraie crorssante. Comme en ce moment même la loi miir— nale venait d’être proclamée par le gouvernement il pe peut y avoir de doute sur le but de la tactique impériale: induire ainsi en erreur les socialistes fran— çaisen se servant, pour les tromper et pour afiaiblir la resistance dela France, des socialistes allemands. Il ne nous paraît pas possible de croire que les hommes de la sociale démocratie allemande se soient pretes consciemment à une manœuvre aussi perfide mais Il faut reconnaître qu’ils se sont laissés abusei bien facilement. Comment expliquer, dans ces conditions, que quelques rours après, les socialistes allemands. rallie's par une brusque volte-face, à la politique impérialiste dc'lcur gouvernement, votérent a« l’unanimité les credits demandés pour la guerre ? l, orsque ' ’ ' . nous eumes connaissance d’une aussi incrr(_\dlo ". ‘ e delaill.rncc, ' … on nous demanda de ne point con —' d‘y i mÏnu<' ltrop \ite nos camarades d’Allemagne et e urs' implications, v '- ' ’ ' ” . armure ( qur' peut-etre 1usnhe— ment leur conduite. ”Ces explications sont venues, mais elles ne jusuhenr rien du tout, et elles suffisent à peine à expliquer, d une lagon raisonnable, la déplorable attitude de la sociale démocratie allemande. Un n ous* &' dit, ' tout d ‘ abord, que dans la réunion la question des préparatoire où l’on avait examiné importante s’était crédits de guerre, une minorité its, et ne s’était montrée hostile au vote de ces créd que par esprit de ralliée àla décision de la majorité discipline. admettre cette Nous ne pouvons, quant à nous, ssée jusqu’à la compréhension de la discipline, pou complicité dans le crime. socialistes d’Al— On nous a dit encore que pour les e, de même que lemagne, la guerre s’était présenté de France, comme pour les socialistes de Belgique et habilement, devant une guerre de défense. On agita Et sans entrer ici leurs yeux, le spectre du tzarisme. de la guerre, je dans la discussion des responsabilités te que pour un socialis puis reconnaitre, sans difficulté, nd, malgré tous ses allemand, l’impérialisme allema despotisme russe. défauts, peut paraitre préférable au en donc défendre, Les socialistes allemands crurent aient de liberté et défendant leur pays, ce qu’ils posséd ocratique et barde civilisation, contre un régime aut bare qui leur faisait horreur. letés du gou— Ce ne fut pas une des moindres habi on de ce senti— vernement allemand, que l’exploitati adroitement styment chez les socialistes. Une presse e et détourna lée annonça l’imminence du péril slav ion publique, a de la Belgique et de la France l’attent tendues sur— l’aide d’histoires mensongères de pré prises et invasions prochaines. llemagne S’il faut admettre que les socialistes d’A aient été,dans les premiers jours du mois d’août, victimes du machiavélisme de leur gouvernement, il faut reconnaître en même temps, et encore une fois, qu'ils se sont laissés tromper bien aisément. Et s’ils ne sont pas coupables de trahison, ils ont, tout au moins. péché par une extraordinaire absence de clairvoyance et de courage. Il eût fallu, sans doute, une énergie qui n’était pas en leur pouvoir, pour oser vouloir voir clair dans le jeu du gouvernement, tt réagir contre les entraînnuents passionnés que suscitaient dans la foule une campagne de men— songes. Tout cela n’est au reste qu’une très petite excuse,si c’en est une. Car, depuis plusieurs mois que dure la emrre. la vérité a pu se faire jour, a travers les fu— mées des batailles et les inexactitudes des journaux. Or, jusqtfici. un seul socialiste, Karl Liebknecht, a en la lU\;…té de reconnaitre s<n erreur première, et de proclamer,en décunbre derni *l', que cette guerre n‘est pas, pour l‘Allemagne, une guerre de défense. Cela j.‘;ge les autres. Quelle que soit d’ailleurs l’idée que les socialistes allemands, abusés ou nOn, aient pu se faire de la guerre, dans les premiers jours du mois d‘août 1914, tt en admettant même qu’ils aient cru à la nécessité de se défendre contre le tzarisme, toutau moins est— il ctrt.iin qu’on peut leur reprocher leur silence hrqne. le .j aout 1914, au Reiclistag, M. de Beth— manu H«.1llweg, chancelier de l’empire. annonça l’entrée des troupes allemandes sur le sol belge, reconnut lui-même l'injustice de cette violation de neutralité et s’excusa en déclarant que la nécessité ne connait point de loi. Le récit de cette journée restera l’une des pages les plus lamentables des annales du parti socialiste. Personne, parmi les très nombreux députés socialistes présents à la séance, ne s’esr levé pour formuler une protestation, ou même un regret, et la députati0n socialiste, ainsi que le reste du parle— ment allemand, et l’Allemagne tout entière, a accepté comme légitime cette maxime immorale et formulée sans pudeur de l’intérêt primant la foi jurée. A dater de ce moment, nous voyons d’ailleurs les socialistes allemands se faire les serviteurs complaisants, et par— fois empressés, de la politique impériale. Nous en avons eu de surprenants exemples, à Bruxelles, où ils ont osé, avec une déconcertante absence de scrupule, se prévaloir des liens de la fra— ternité socialiste, pour essayer de provoquer des défaillances qui eussent été des trahisons. Un certain nombre de socialistes, et notamment le député Franck, s’engagérent volontairement dans les armées allemandes, dans les rangs desquels la loi comportant le service général avait deja incorporé un grand nombre de « genossen ». Ce sont ces soldats—là, qui, comme les autres, ont fait en Bel— gique et en France, la guerre atroce, déloyale et sauvage que l’on sait. Et ces méthodes barbares n’ont jamais donné lieu à une protestation quela __ vains du conque, de la part des orateurs et des écri r qu‘une parti. Il a fallu attendre le mois d’avril, pou dracoprotestation s’élevât contre une proclamation relative, nienne du feld—marécbal von Hindenburg, d‘ailleurs, a la campagne russe. nce Il serait peut—être injuste de reprocher ce sile celle e que à la presse socialiste, car il est vraisemblabl ite ci ne peut se publier que sous la surveillance étro n— de la censure impériale. Mais rien non plus. cepe au dant, ne nous permet de supposer qu’il y ait eu, sein du parti, des eliorts quelconques pour rentrer dans la tradition internationale. Bien au contraire, on a vu certaines notabilités socialistes se répandre dans les pays neutres, en émissaires suspects, pour y pro— pager les lourberies imaginées par la politique impé— riztle. Un seul événement, consolant au milieu de tant d‘autresà déplorer, est la ferme et courageuse protestation de Karl Lieblmecht, lors du vote des seconds crédits de guerre, en décembre 1914.Se refusant, cette fois. a suivre en cette matière la discipline du parti, l.itültiieclit se sépara de ses amis, et justifia son vote par une déclaration écrite, que le président retusa de comprendre dans l‘ordre du jour, mais dont le texte nous est quand même parvenu : « Cette guerre n‘était dans la volonté ni du peuple allemand nid’aucun autre peuple. C'est une guerre impérialiste, une ;.Ïllt‘llt‘ pour la conquête du marché mondial, pourla domination sur d‘nnportants territoires et leur exploi— 43 ___— tation capitaliste. C’est une guerre provoquée par les partis de la guerre de Germanie et d’Autriche, dans le mystère d’une diplomatie secrète. C’est en même temps une guerre pour énerver le mouvement crois— sant de la classe ouvrière. Le mot d’ordre allemand « contre le tzarisme » n’a été proclamé que pour exploiter les plus nobles inclinations et les traditions révolutionnaires de notre peuple. L’Allemagne, com— plice du tzarisme et modèle de la réaction politique, ne peut prétendre au rôle de libérateur des peuples. La libération du peuple allemand, comme du peuple russe, doit être leur oeuvre propre. Cette guerre n’est pas pour l’Allemagne une guerre de défense... je proteste à nouveau contre la guerre, contre ceux qui en sont responsables,contre les entreprises capitalistes pour lesquelles elle a été déclarée, contre les projets d’annexion, contre la violation de la neutralité de la Belgique et du Luxembourg, contre l’extension illimitée de la loi martiale, contre la défaillance de leur devoir social et politique dont le gouvernement et les classes dirigeantes sont coupables... >> Il est à regretter, pour l‘honneur du socialisme allemand, qu’un pareil langage soit resté sans écho. N0tons, cependant, qu’il la même date, le député Haase fit savoir au Reichstag, qu’à la suite des faits révélés depuis le début dela guerre. le parti socialiste étaitunanime a penser que l’on n’avait pas indiqué de raison militaire suffisante pour justifier la violation de la neutralité de la Belgique et du Luxembourg. Le On peut trouver cette déclaration tardive et bien timide. lille ne fait, somme toute, que répéter ce peut toujours se méfier de tout ce que l’autorité laisse publier, et soupçonner que des déclarations qui paraissent lui être hostiles peuvent servir les desseins secrets de sa politique. Certains députés socialistes allemands se sont malheureusement révélés comme les agents du gouvernement. Même en admettant (ce qui nous parait devoir être admis)la parfaite sincérité des Quertreiber, il est bien évident qu’ils ne sont que le chancelier de l’empire lui—même avait reconnu, dans leur des le .4aoi1t, et elle ne va pas aussi loin que lui, même qu’il est évident aussi qu’en se ralliant sans réserve à la politique impérialiste, le parti socialiste allemand a perdu ses plus grandes chances d’être parti considérait, a—t—il dit, « cette violation comme contraire a la justice >>. Cette déclaration fut supprimée par la presse alle— mande et par la censure, mais une relation en fut transmise en Angleterre et publiée dans le Labour laurier. dans la logique de l’équité. En déclarant, en etïet, que l'.-\llunagne commettait une injusüce, M. de Bethmann Hollxveg promettait de la réparer. Lorsqu’en décembre 1914, les socialistes allemands purtnt apprécier les conséquences etlroyables de cette injustice, ils ne semblent s’être préoccupés ni de la faire cesser, nt des réparations nécessaires. L’attitude” de thlçnecht qui avait eu, le premier, le courage de se séparer de la majorité de son parti, lut suivie. en juin 1913, par Kautzkv, Bernstein et liaa*e qui publiCitiit un manifeste, dit des Quertreibet. dans lequel ils déclcuaient vouloir réaliser la paix sans annexion ni conquêtes. Ils furent solennelle— ment répudiés par le parti, et leurs déclarations don— nL-tcnt lieu a des polémiques, des résolutions et des controverses dans lesquelles il est bien difficile de dé— mtlçr la vérité exacte. liiant donné le régime de c…sure gouvernemen— tale qui stÏ‘\‘it tris rigoureusement en Allemagne. on parti, qu’une minorité impuissante, de écouté. L’action de Kautsky, Bernstein et Haase ne nous paraît pas pouvoir avoir de sanction pratique et même s’ils parvenaient, ce qui semble peu probable, à rallier autour de leur Opinion la majorité du parti, ils ne pourraient évidemment pas faire reculer les tendances pangermaniques. Leur initiative a eu, au contraire, pour elïet d’accentuer davantage l’attitude impérialiste de la majorité des socialistes allemands, qui abandonnent de plus en plus les principes traditionnels de l’internationalisme, et approuvent la poli— tique de conquêtes poursuivie par le kaiser. La séance du Reichstag à la fin d’août 1915 en a fourni une nouvelle preuve; les socialistes ont suivi docilement la politique de l’Empire, et l’ordre du jour qu’ils ont adopté ne contient plus rien des prin— cipes fondamentaux qu’ils défendaient jadis. Bien plus, un volume : La classe ouvrière dans l’Allemagne nou— abo— vrlir qui vient de paraître à Leipzig, avec la coll députés ration de Scheidemann, N0slæ et autres socialistes, indique un essai de rapprochement avec les libéraux ! IV AUTRICHE-HONGRIE L’attitude des socialistes autrichiens apparait, au cours de la crise actuelle, comme semblable en tous points à celle des socialistes allemands. Ainsi qu’eux, ils ont, avant la déclaration de guerre, protesté avec véhémence contre les risques de conflits san— glants que faisaient courir au monde la concurrence capitaliste et la politique de proie des gouvernants d’Europe. Leur opposition passée à toute entreprise impérialiste, à toute aventure militaire les a poussés, par l’effet de la vitesse acquise, à élever contre les menées provocatrices de l’Autriche à l’égard de la Serbie une protestation indignée. Dans ce manifeste paru dans la secondequinzaine dejuillet 1914, ils pro— testaient également contre les mesures prises par leur gouvernement pour empêcher toute manifestation de l’opinion démocratique. Il convient d’attirer spécialement l’attention sur ce manifeste, d’autant plus que c’est le seul acte du parti social-démocrate autrichien, qui soit parvenu à notre connaissance. Depuis lors, les socialistes autrichiens paraissent avoir été muets. Ont-ils renoncé à faire entendre leur voix? C’est peu probable; il est plus vraisemblable de croire qu’ils ont été bâillonnés. Dès le 22 juillet, leur tournal l’ÀI‘1’WÏlCÏ Zeitung était sévèrement traité par la censure. Le manifeste se terminait comme suit : « Nous sommes d’autant plus fondés àfaire cette déclaration, que les peuples d’Autriche ont été, depuis plusieurs mois, privés de leurs droits constitutionnels et qu’on leur a enlevé toute tribune d’où ils auraient pu faire entendre leur volonté. « En présence de la guerre qui demande à chacun les plus lourds sacrifices de sang et d’argent, la viola— tion préméditée de la volonté populaire, en éliminant le parlement, est de nature à aigrir et a irriter. << Nous répudions toute responsabilité dans la guerre, nous en laissons solennellement la responsa— bilité a ceux qui, des deux côtés, l’ont provoquée. lin ceci, nous ous savons d’accord avec le prolétariat conscient du monde entier, et même, avecles social- dtmocr.nes de Serbie. Nous nous vouons à l’oeuvre de la civilisation, itla sociale—démocratie internationale, ji laquelle nous seronslidèles durant notre vie entière, et donnes jusqu’à la mort… » Ainsi qu’on le voit, l’allure de ce manifeste estassez belle. Notons qu’il ne fut pas signé par les députés de l5olït‘lïlt et de Pologne, sur l’attitude desquels nous n’avons pas de renseignements. Comment d’aussi nobles intentions n’ont-elles été suivies d’aucun acte? Comment un parti qui s’était assuré 82 sièges sur 316 a—til pu être réduit à l’impuissance totale ? Cela reste encore un mystère. Il parait néanmoins certain que la violation de la neutralité belge n’a pas impressionné la démocratie socialiste autrichienne et cependant, de ‘a part de l'Autriche, elle a eu un carac— tère particulièrementodieux et contraire au droit des gens. Non seulement l’Autriche avait, commel’Allemagnc, garanti la neutralité perpétuelle de la Belgique, mais elle n'avait pas, comme l’.—\llemagne, l’excuse d’une attaque possible de la part de la France. Et, poussant plus loin que l’Allemagne le mépris du droit des gens, l'Autriche a fait la guerre a la Belgique, par surprise, et sans la lui déclarer. On sait, en eflet, que l’artillerie autrichienne était en action au siège de Namur et que la rupture des rapports diplomatiques entre l’Autriche et la Belgique ne s’est produite qu’ultérieun ment. Citons enfin, d’après la Bataille syndicale, les principauxpassagœ du manifeste que le Parti social democrate allemand de l’Autriche et le Comité de la frac— ton Social Democrate au Reichsrath autrichien ont adressé, en date du 23 juin 1915, a la population ouvrière : « Cette décision inébranlable de maintenir notre existence propre aussi longtemps que la dure néces— sité de la défense subsiste n’est nullement contredite parle souhait, grandissant de jour en tout et d’heure en heure dans t us les milieux chez les peuples be…— a gérants, de voir la fin de la lutte, la volonté s’imposant toujours avec plus de force de voir la paix conclue. C’est le devoir de tous ceux qui portent quelque responsabilité d’écouter cet appel et de chercher avec ardeur la voix de la paix. \7 « Les social-démocrates autrichiens ont, avant la guerre, fait tout ce qu’il était en leur pouvoir pour ANGLETERRE éviter celle-ci ‘. Pendant toute sa durée, ils ont fidé- lement rempli les devoirs leur incombant de la défense du pays, mais ils n’ont jamais cessé de déclarer solen— nellement qu’ils désirent et ne connaissent d’espoir plus grand, ni de souhait plus tervent, que de voir, après comme avant la guerre, les membres de l’Internationale prolétarienne mis en leur pleine puissance, épurée encore par leur expérience, au service del'œuvre de la paix. » 1. Ici il faut un mot de protestation. Même de bons socialdémocrates comme le théoricien marxiste Pannekoelæ, ont cons- taté, au début de la guerre, que ce sont précisém:nt les socialdémoa-ates autrichiens qui ont les premiers manqué à leurs devoirs, même avant les Allemands, et que la Wiener ArbeiMrçvilung (le journal de l’ouvrier de Vienne) organe officiel de la social-démocratie autrichienne, attaqua alors le gouvernement serbe, faisant ainsi le jeu de son gouvernement ; par contre, les Serbes tant méprisés firent leur devoir, où même, pour cette guerre de défense, les camarades serbes refusèrent de voter les crédits de guerre, agissant ainsi dans l’esprit de Bebel et de Licbltnecht en i870. (Note de la Bataille Syrzdicaliste.) Pour pouvoir exposer l’attitude des socialistes anglais à l’égard de la guerre actuelle, il convient tout d’abord de rappeler qu’il n’existe pas en Angleterre un parti socialiste unique, mais trois organisations distinctes qui doivent être considérées séparément : 1° Le parti ouvrier ou Labour Party comprend l’ensemble des organisations ouvrières ayant pour but principal l’amélioration des conditions économiques du prolétariat. Les membres des Trades-Unions que réunit ce programme se partagent, au point de vue politique, en Opinions variées. 2° Le parti ouvrier indépendant (lndependant Labour Party) ou usuelletnent I. L. P. qui est une section du Labour Party, plus spécialement politique,d’un caractère socialiste accentué. C’est l’organisation la plus considérable du Royaume—Uni. 3° Le British Socialist Party, ou parti socialiste britannique, qui groupe tous les socialistes non affiliés à l’organisation précédente. Au Labour Party se rat- ___“)‘3y. tacite la Fabian Society, composée surtout de démo— crates socialisants, qui, tout en acceptant l’étiquette socialiste, préconisent le plus souvent des solutions d’un caractère modéré. L’attitude de ces dilïe'rentes organisations n’a pas toujours été concordante, et dans l’intérieur de cha— cune d’elles, l’opinion ne fut pas toujours unanime. Il serait donc téméraire de vouloir l’apprécier trop sommairement. Toutefois,d’une façon générale, on peut suivre, dans l’opinion socialiste anglaise, une évolution plus ou moins lente qui la conduit de l’hostilité systématique à la guerre, de la sympathie pour l’Alle— magne et de la crainte de la Russie, a la compréhen— sion du danger que fait courir à la liberté des peuples et à la démocratie, l’impérialisme germanique, et à la résolution de soutenir la guerre actuelle jusqu’à la complète défaite du militarisme allemand. Nous allons essayer de tracer quelques traits de cette évolution. Avant la guerre, tous les socialistes, sans distinction, étaient, en Angleterre comme dans toute l‘Europe, partisans de la paix, du règlement des contestations internationales par voie d’arbitrage et hostiles aux dépenses militaires. Seul, le vénérable Hyndmann avait parfois signalé qu‘il pouvait être nécessaire de se préparer à des rement contre Sir Edward Grey, dont ilavait dénonce l’attitude germanoplrobe et demandé la démission. En 1912, dans une réunion à Birmingham, l’l. .L. P. avait réussi à faire admettre son opinion parle Labour Party et a faire voter un ordre du jour de blâme pour Sir Grey. Dans la dernière semaine de juillet, lorsque l’Autriche menaça la Serbie, les socialistes d’Angle— terre furent unanimes a réclamer un ellort pour le maintien de la paix européenne, et tout au moins le maintien de la neutralité de la Grande-Bretagne. Après le meeting du 29 juillet, à Bruxelles, un mani— feste signé de Keir Hardie et Arthur Henderson lut adressé àla classe ouvrière. Il lui demandait « de faire campagne pour ne pas s’allier au despotisme russe dont la victoire serait un désastre pour le monde. Il n’y a pas de temps a perdre; deja par des traités secrets et des ententes dont les democraties ne con— <Ya 'c"s dans la voie naissent pas les termes, on nous a en bl" du conflit. Hommes et femmes, proclamez que pour vous les jours de pillage et de massacre sont passés, envoyez des messages de paix et de Fraternité Ii ceux qui ont moins de liberté que vous. A bas le règne de la force brutale ! a bas la guerre ! vive le règne pacifique du peuple ! » int—ne une campagne extraordinairement violente Une manifestation fut organisée, le 2 août, a Trafilgar—Square, a Londres, et les délégués des dilïé— rentes organisations socia.istes et ouvrières y furent contre le militarisme et les armements, et particuliè- présents. résistances éventuelles, mais il n’avaitguère été suivi. lÏt l’lndepçndant Labour Party, notamment, avait .— 54 _. On évalue le nombre des manifestants à 15.000, chiffre modique étant donnée l’énorme population de Londres, et qu’il faut expliquer sans doute par le fait que la grande masse ne comprenait pas encore la gra— vité de la situation. Un ordre du jour fut voté déclarant que l’Angleterre n’avait aucun intérêt direct ou indirect à s’oc— cuper des désaccords existant entre l’Autriche et la Serbie, et invitant le gouvernement à se refuser absolument à toute participation a la guerre, et à con— sacrer tous ses efforts, au contraire, au rétablissement rapide de la paix. Parmi les moyens de sanaionner pratiquement la volonté ainsi exprimée, les mineurs proposérent une grève générale des mineurs d’Eu— rope. Mais les événements devaient se précipiter tellement rapidement qu‘aucune suite ne put être donnée a CL tte proposition. Lorsque, le 3 août, Sir Edward Grey exposa la situation européenne à la Chambre des communes, Ramsay Mac Donald, au nom du groupe parlementaire socialiste, luidonnarort; illui reprocha de parler abusivement de l’honneur de la nation, et prétendit, qu’au contraire, l’honneur du peuple exigeait la neutralité. L'invasion de la Belgique eut lieu le lendemain, l_ aout. Llle devait contribuer à modifier puissamtnent loptmon anglaise ; mais cette évolution ne se fit pas sans une certaine lenteur. La î:3}qoäqtÏ,ÿîÇïs}z/y Ciîiçen et le bureau exécutif du 3} _ , ment que l invasion de la Belgique n etait pas une raison suffisante d’intervention. -.…. 55 _-= Il fallait se garder de soutenir le tzarisme pourrisseur et despotique. Le même jour, le leader du groupe parlementaire, M. Ramsay Mac Donald, proposa à ses amis de donner lecture àla Chambre des communes de la résolution du bureau exécutif. La majorité refusa de le suivre, et Ramsay Mac Donald résigna ses fonctions de président. Ce fut le premier symptôme d’une divergence de vues qui devait s’accentuer par la suite. Tandis que les uns restaient hypnotisés par le péril russe, les autres voyaient grandir le péril allemand. Ces divergencesse manifestèrent à nouveau lorsque l’Angleterre, pour faire honneur à sa garantie de la neutralité belge, eut décidé d’intervenir dans le conflit. Elle n’avait qu’une armée de terre insignifiante. Il lui fallut donc songer à créer immédiatement des troupes pouvant être envoyées sur le continent. Et comme la législation anglaise ne comprend point le service général, elle devait recruter ses troupes au moyen d’engagements volontaires. Les députés organisèrent une série de meetings en faveur du recrutement et à la fin du mois d’août, les députés socialistes acceptèrent de faire partie de ces équipes parle— mentaires, à l’exception toutefois des représentants de l’l. L. P. Dès cette époque, le Daily Citizen, organe du Labour Party, déclare la patrie en danger, affirme qullle ne peut pas être vaincue, dùtl.1guezre durer plusieurs années. Il engage tous les ouvriers à “56“— iaire tout pour assurer la victoire, reconnaissant que la guerre est une question d’honneur pour l‘Angleterre gatante de la neutralité de la Belgique, qu’elle a été voulue par l’Allemagne dont le triomphe serait un danger pour la démocratie et dont la défaite doit assurer la paix future du monde. On peut donc dire que, des le mois de septembre 1914, le parti ouvrier, en très grande majorité tout au moins, s’était décidé à soutenir énergiquement le gouvernement. Il n‘ln tut pas de même de l’I. L. P. Il continua pendant plusieurs mois son opposition Les thèmes de son argumentation peuvent se résumer en deux points : I" La crainte russe. A comparer le péril russe et le péril allemand, il fallait, selon les orateurs del’I. L. P., considérer que celui—ci était moindre que celui-là, à raisonde la puissante organisation du parti socialiste allemand, pouvant faire contrepoids à l’impérialisme, tandis que dans l’empire du tzar, la démocratie était incolierente et sans force. ’ 2' Le refus de se tenir pOur liés par les arran— gements secrets de la diplomatie, arrangements qui avaitnt pour conséquence d’entraîner la France à la suite de la Russie et l’Angleterre a la suite de la France. Le peuple n’avait pas été consulté sur ces conventions si importantes pour son avenir et ne pouvait pas être obligé de les ratifier. 011 pouvait répondre à ces raisonnements, et on leur répondit, en effet, que, d’une part, l’événement avait démontré que les socialistes allemands n’avaient pas été le contrepoids espéré àla politique militariste de l’empire; que, d‘autre part, le traité obligeant l’Angleterre à garantir la neutralité belge n’avait rien de secret et n’avait jamais été critiqué en Angleterre depuis trois quarts de siècle. Les discussions continuèrent pendant plusieurs mois et l’opposition de l’I. L. P. a la campagne de recrutement finit par perdre tout caractère de prin— cipe. Ses chefs demandèrent seulement que cette cam— pagne se rit par le parti lui-même, sans s’associu‘ aux autres partis et sans se laisser entrainer a la justification de la guerre. On retrouve enfin, dans toutes ces controverses, le désir constant de distinguer, chez l’adversaire alle— mand, entre le peuple et le gouvernement. On veut bien lutter contre l’impérialisme germanique, mais sans toucher à l’Allemagne elle—même. On conserve l’espo(i_r de la débarrasser de son militarisme et de renouer, avec son prolétariat, les liens de l’Interna— tionale ouvrière. Nous n’avons pas parlé jusqu’ici du parti socia— liste britannique. L’extrait d’un leading article de H. M. Hyndmann, dans le journal justice du 13 août 1914, sullit à indiquer que les membres de ce parti se rangérent rapidement aux côtés du gounrnement anglais pour le soutenir contre l’Allemagne: « Quand le milita— …...)3… …. 59 __ risme agresseur de l’Allemagne a délibérément violé les traités signés pour garantir la neutralité belge; quand il a déclaré la guerre, attaqué et maltraité cette petite nation, quand notre ami E. Vandervelde, occasion, une paix raisonnable et honorable. Quand la victoire finale sera assurée aux Alliés, l’influence le président du Bureau international, un homme de paix s’il en fut jamais, futenvoyé par le parti ouvrier belge au gouvernement pour aider au maintien de l’indépendance de son pays, quand le noble jean Jaurès dénonça l’outrage commis par la Germanie et l’Autriche contre la civilisation, quand le gouver- nement allemand fit ces propositions, justement qualifiées infâmes, pour s’assurer la neutralité de la Grande—Bretagne, alors il est tout à fait impossible pour nous de ne pas reconnaître que, comme nation, nous sommes tenus, non pas par des arrangements secrets, mais par des traités solennels et les déclara— tions internationales de la Haye (qui n’ont jamais été jusqu‘aujourd’hui dénoncées ou condamnées par ces pacifistes parlementaires si ze'lés aujourd’hui pour la neutralité) à déclarer la guerre à ce perturbateur de l’Europe et traître à ses engagements. » A l’occasion de la campagne de recrutement, le parti socialiste britannique prit la résolution d’y par— ticiper en reconnaissant que la liberté et l’indépen— dance nationales étaient menacées par le militarisme prussien. Elle ajoutait :« Nous n’avons pas l’intention d\urcer une vengeance cruelle contre le peuple alle— mand et nous cœubattons pour obtenir, à la première anglaise devra s’exercer pour mettre fin au milita— risme, aux armements et à la diplomatie secrète, et pour déterminer, entre les peuples d’Europe, une entente democratiqu€. « Le parti socialiste britannique déclare une fois de plus que les travailleurs d’Europe n’ont pas de que— relles entre eux. La terrible lutte à laquelle nous assistons et dans laquelle nous avons été entraînés par l’invasion de la Belgique est bien l’aboutissement des rivalités entre les capitalistes de tous les peuples pour la domination des marchés du monde. » C’estencorè H.—M. Hyndmann qui, le tomars 1915, écrivait à Georges Clemenceau au sujet des hésita— tions pacifistes des chefs de l’I. L. P. : « Il n’y a pas l’ombre d’un doute que l’écrasante majorité des ouvriers de cette ile ne soient pour la guerre. Le parti ouvrier parlementaire (the Parliamentary Labour party), à l’exception d‘une demi—douzaine de paci— fistes ou même moins, est également favorable à la guerre. Et ce n’est pas tout, car des centaines de mil— liers parmi les deux millions de soldats qui sont actuellement sous les drapeaux sortent du milieu des travailleurs — et non pas des travailleurs non qualilifiés et mal payés, mais des rangs des trade—unionistes les plus authentiques. C’est ainsi qu’actuellement, dans une seule armée, il n’y a pas moins de 200.000 mineurs dont le salaire, au moment ou ils s‘enrô— __6I_ ——60— lèrent, était de 10 francs par jour, et qui, tous, a ce moment avaient du travail. Je voudrais bien que MM. Ramsay Mac Donald, Keir Hatdié et \V.-C. Anderson aillent parler a tous ces gens—là, pour essayer de blanchir, fût—ce très légérement, les bourreaux des civils, des femmes et des entants en Belgique et dans le nord de la France... » Cette lettre fut adressée à l’Homme Enr/miné, à la suite de l’émotion qu’avaient produite en France les réserves et les restrictions de certains membres de l‘l. L. P., lors de la conférence de Londres du 15 février 1915. entre les socialistes des pays alliés. Cette conférence avait eu quelque peineà se mettre d’accord sur les termes d’un ordre du jour, en raison même des nuances d‘opinion existant en Angleterre et en Russie, parmi les représentants des partis avan- cés. Cute diliiculté paraîtra normale à ceux qui ont suivi les détails que nous avonsprécédemmentrelatés. Mais pour en atténuer encore l’ellet. vingt-sept députés ouvriers anglais; appartenant au Labour Party, adnsserein en mars 191 3. aux socialistes belges et français, une lettre de sympathie disant : « Nous reconnais— sons que vous défenden non seulement vos libertés nationales, mais que vous combattez aussi pour la liberté de l‘Europe entière contre la domination du nnlitaristne des despotes. Nous avons la plus grande admiration pour votre courage, et nos sentiments sont partagés par la masse des travailleurs organisés de la Grande—Bretagne. Des centaines de milliers de trades-unionistes, indignés de l’agression criminelle de l’Allemagne, ont volontairement joint l’armée formée dans le Royaume—Uni pour combattre avec les Français et les Belges. Nous avons supporté toutes les mesures qui sont de nature à faire, de cette armée de volontaires un grand et puissant instrument pour la défense dela démocratie et de la civilisation contre les forces de l’autocratie et du despotisme. Nous vous assurons, camarades français et belges, que nous sommes avec vous de coeur et d’âme dans votre détermination de libérer la France et la Belgique de l’envaltisseur, d’assurer le rétablissement des territoires ravagés, et de mettre tin, une fois pour toutes, a la menace du mili— tarisme. » Depuis lors, à mesure que se sont déroulés les évé— nements de la guerre européenne, les socialistes anglais ont de mieux en mieux compris le pcril que faisait courir à la démocratie l‘impérialisme allemand et ils ont accepté sans grande protestation des lois comme le Muni/[ons Act (iuillet 1915), les énormes charges financières de septembre et ils ont déclaré récemment que si la nécessité en était démontrée, ils accepteraient même la conscription obligatoire. VI RUSSIE La situation en Russie est autrement difficile à exposer. Il faut noter, tout d’abord, qu’en raison du despotisme du Tzar, l’organisation du parti y est à peu près secrète et que tout renseignement précis, sur son importance et sur son action, ne peut être publié. Rappelons qu’en 1912, Roubanovitch répondait à une demande de statistique, que lui avait adressée le Bureau socialiste international : << Le seul renseigne— ment que nous puissions vous donner est le nombre des membres de notre parti qui sont prisonniers du Tzar ou relégués dans des forteresses, des prisons ou deslieux d’exil. » Toute manifestation publique d’une terrible et sans précédent s’est abattue sur les peuples du monde entier. Des millions de travailleurs ont été arrachés à leur travail et précipités dans un torrent de sang. La guerre a commencé. Au moment où les gouvernements d’Eur0pe s’y préparaient, la classe ouvrière du monde entier, allemande en tête, a pro— testé avec unanimité. Le cœur des travailleurs russes est avec la classe ouvrière d’Europe. La guerre est provoquée par une politique d’expansion dont les classes dirigeantes de tous les pays sont seules responsables. La classe ouvrière des pays en guerre n’était pas sufiisamment puissante pour prévenir cette guerre et le retour à la barbarie qui en sera le résultat. Mais nous sommes convaincus qu’elle trouvera dans la solidarité prolétarienne internationale les moyens d’imposer la paix à une date prochaine. Les conditions de la paix devront être dictées par les peuples et non par les diplomates. Nous sommes convaincus que cette guerre ouvrira définitivement état politique analogue à ceux dont nous avons parlé les yeux des grandes masses d’Europe et leur montrera les causes véritables de l’oppression qu’elles endurent et que cette explosion de barbarie sera la dernière. » Après cette déclaration le citoyen Khanstoff, suivi ]usqu a présent. de ses amis, quitta la salle des séances, sans voter les Rappelons seulement quelques faits. Lorsque la question des crédits de guerre vint en discussion à la crédits militaires et la confiance au gouvernement. Les deux journaux socialistes de Pétrograd furent supprimés et les éditeurs emprisonnés. D'autres jour— volonté hostile au gouvernement y est réprimée avec la plus terrible sévérité. Il est vraiment difficile, dans ces conditio:rs, de considérer la Russie comme un Dounia, Valentin Khanstotf déclara : « Une calamité —64——— naux du mouvement ouvrier et coopératif furent éga- pement de la vie libre des nations, un obstacle consi— lement interdits et peu de temps après la déclaration de guerre, il n’y avait plus de presse socialiste en dérable et prolonge. Les démocrates, les républicains et les socialistes de Belgique, de France et d‘Angle— terre ont décidé d’employer toutes leurs forces a pré— venir un pareil désastre. Les nations a gouvernement démocratique doivent pouvoir compter, dans cet hor— rible conflit, sur l’aide armée du peuple russe. » Il y avait deux groupes dans la sociale démocratie Russie. les poursuites politiques se multiplièrent avec la plus extrême sévérité. Les droits des Polonais, des Finlandais et des juifs turent contestes, bien que le gouvernement du Tzar, sous l‘influence de la démo— cratie française, eut laissé espérer aux Polonais leur autonomie. On comprendra que, dans ces conditions, il était impossible aux socialistes de Russie de se ral— lier a un gouvernement qui révélait une fois de plus, avec brutalité. ses tendances autocratiques et réactionnaîres. Un grand nombre de socialistes russes étaient donc liOstile a la guerre, a la fois parce que c’était la guerre et parce qu’elle avait été décidée par le Tzar. Néanmoins, Cette opinion n‘etait pas unanime, et certains socialistes ou anarchistes, élargissant leur horizon, et notamtmnt le prince l(ropotkine, com pre- naient le danger que l‘impérialisme allemand repré— sentait pour la liberté des peuples en Europe. lin novembre 1914, Émile Vandervelde, leader socialiste belge, adussa aux socialistes russes un message, dont voici un extrait : « La défaite, non pas de l‘Allemagne, mais du jurilteei'isme prussien, est une question de vie ou de mort. Si la Belgique pouvait etre détruite. la France et l‘Angleterre vain— cue… et le militarisme allemand triompl1ant, ce serait, pour le progrès de l’humanité et le dévelop— russe : l‘un et l‘autre étaient hostiles à la guerre et acctteillirent avec froideur le message du député belge, en exprimant l‘opinion que, si ldiÔgé‘lltOtlit) militaire allemande était un danger pour la liberté, l’autocratie russe leur paraissait un danger plus redoutable encore, et qu’il leur était impossible de con— clure la moindre tréve avec un oppresseur sans pitié. Toutefois, le cours des événements semble avoir modifie, cltez certains socialistes au moins, cette manière de voir intr'ansigeztnte. lit l‘on a pu constater, en février 1915, a Londres, que tous les délégués des diverses nuances du socialisme et de la démocratie russe, s‘étaient ralliés a l‘ordre du jour qui fut voté par les Francais, les Anglais et les Belges. Une lettre de lii'opotltitie publiée dans lH/t/lnlili/d du 3 octobre 1915 disait : it Il faut aider .‘t écraser l‘ennemi de nos aspirations les plus chères : le mili— tarisme prtissien et l‘impérialinne allemand. Liebltneclrt et Bebel ont deja lutté en 1871 avec cet esprit, Balcounine aussi (Lerlrer aux Francais). ll ) -—66—nous est interdit de rester neutres, car dans le cas actuel la neutralité ne serait que la complicité en faveur de leurs poings de fer. Les Alliés vaincront, les droits des nationalités à leur libre développement seront reconnus, le principe fédératif trouvera son application dans la carte nouvelle de l’Europe. » Il nous est extrêmement difficile d’être exactement renseigné sur ce qui se passe actuellement en Russie, mais il semble bien que lors de la fameuse séance de la Douma qui, après la conquête de la Pologne et les revers russes, a attesté le magnifique réveil des éner— gies nationales, les socialistes russes se soient joints aux partis libéraux et démocrates pour s‘opposer à toute paix séparée et mener la lutte jusqu’au bout. Cette appréciation est confirmée par un manifeste publié dans l’Hmazam'ic' d’octobre 1915, comme issu d’une conférence ou participaient, côte 51 côte, des délégués de la fraction social-démocrate et de la fraction socialiste révolutionnaire, tels que Plekhanof, Bach, Deutsch, l. Axelrod, Alexinskv, Onipko. ll disait : … La victoire des empires centraux sur le front occidental équi\‘audrait au triomphe du principe nmnarclrith, a peine limité par des institutions cons— iiiutionnelles, surlcréuime démocratique, qui va s‘af- ltl'll‘il‘xëk‘llll en France et en Angleterre et qui n’était plus loin de triompher en Belgique. Parconséquent, la victoire des alliés de la Russie est autant a désirer dans l‘intérêt de la civilisation, de la liberté et du ‘i\’l lll*lllc, que la victoire ru.s«e elle—mème « Ainsiles intérêts essentiels des masses laborieuses russes, aussi bien leurs intérêts du présent que ceux de leur libération économique et politique à venir, imposent, tant aux socialistes qu’à toute la démocratie révolutionnaire dont le socialisme forme l’avant— garde, le devoir de participer activement à la défense du pays. » _— 69 ___ grade. lit au Parlement le discours suivant, qui a la valeur d‘une prophétie : « Nous sommes opposés a la guerre entre les peuples des Balkans non seulement parce que la \‘Il guerre serait sanglante et horrible, non seulement parce qu’elle ruinerait les Balkans, mais a cause des SERBIE Avant la premiere guerre des Balkans, le groupe socialiste du Parlement serbe avait plaidé en faveur de la création d’une Fédération des Balkans et voté contre les budgets de guerre (2 juillet 1912). Alors, tous les chefs des partis bourgeois approuvùrent l’attitu le du gouvernement et leur promirent leur appui. Le chef du parti socialiste Lapchevitch se déclara, au nom de ses partisans, contre la guerre avec la Turquie et pour une Fédération démocratique des États des Balkans. effets indirects qu’elle aurait, dont la perspective apparait terrible, même si les puissances n’ont pas encore réalisé un accord sur la division des Balkans. « Même si Cette décision n’a pas encore été défini— tivement arrétée, la guerre ne manquera pas d’apporter quelque intervention des grands États capitalistes intéressés et cette intervention peut entraîner une confiagration générale en Europe, un ensanglante- ment général et la disparition et politiques dus aux eliorts dentes travaillant depuis des ser ». Le premier ministre serbe, des gains économiques des générations précé— siècles pour les réali— Paschitsch, en un dis- Au moment de la seconde guerre des Balkans, l’ac- cours prononcé devant la Skupschina, en mai 1913, tion du parti socialiste serbe fut encore plus courageuse avait fait, contre la Bulgarie. une attaque tres com— et explicite. iiieiitee. Les socialistes publie-rent la proposition sui— Aux élections du 3 avril 1912, les socialistes sétaient assurés deux sièges au Parlement et 25.000 voix sur un peu plus de 300000 votants. ils avaient des candidats seulement dans six circonscriptions et déclaraient qu’ils eussent pu avoir 50.000 votes s’ils avaient présenté plus de candidats. Le 12 octobre 1912, Lapchevitch, député de Bel— vante d’une Confédération balkanique. « La Social Démocratie … demande de nouveau, comme elle l'a souvent fait dans le passé, la cessation inunédiate des hostilités et le rappel de toutes les troupes, atin qu‘elles puissent retourner à un travail utile eta la civilisation. « Le parti social démocrate de Serbie dénonce … , o ——-« . ' ) )‘ . ‘ v — . nalrtes qui ne peut être divisé en lignes géogra- pluques correspondant a leurs affinités nationales respectives. (« l\ Une. t'lii‘isi.on tU‘IlÎOÎIHlC " ' ' ’ etats ' ’ en napporterait iL. urpte’. dtsiiée. Au contraire, < ' iîisl chacun de ces états ‘ '= t(tevieutrait ‘ , loppiesstur d ’ un grand nombre d’habi—' antsyctrangers. r\‘ous dénonçons ouvertement, par topsequent, tout essai de diviser de la sorte la pénin— rt ba.kamqm. Nous ofirons notre appui à une union des peuples des Balkans; nous sommes convainletrs que seule, la formation d‘une Fédération des Bal— <ansdonneui ‘ “ nation ' ' ' ] \ autonomie , ‘ ii 1 chaque ° nationale, ' r (\S\‘ ne .t a clraqtu nation le progres dansles domaines 'A“. . j . ,_, / energiquenient les querelles, les conflits, les inimitiés qui peuvent avoir pour seul résultat d’accroître ramertuniC entre les nations balkaniques et proteste contre tout essai de dérober aux nations balkaniques . . droits leurs ' ' ‘ a" lautonomu, ' '3 et de les forcer a‘ un con—i trole national. « Le parti social démocratique est d’avis que la ptmnsule des Barkans est faite d’un mélange de natio— ’\ ‘I \ \ ne_l industrie et de la culture. Car nous considérons qu une telle fédération constitue le seul moyen efti— t.ice de detense contre les désirs impérialistes ou colo— niaux des Puissances européennes. \\ Le parti social démocratique de Serbie voit avec es. dont habitudes, dont les inclinations sont identiqu aires. l’activité industrielle, dont les intérêts sont simil de BulLes partis social—démocratiques de Serbie et gique, garie levent la voix en une protestation éner geantes contre la haine artificielle que les classes diri tat: excitent et qui ne peut conduire qu‘à un résul a— balk les des conflits armés et la destruction des peup niques. nos << Contre la dangereuse opposition organisée de aires milit s dirigeants, les cliques capitalistes. les clrel listes de et la bourgeoisie sans scrupule, les partis socia Bulgarie, Roumanie, Grece, Bosnie, l’léi'L/.égovine, crates et Croatie et Slavonie, aussi bien que l\S démo . plaident les progressistes mouténégrins et albanais a.riques, pour qu‘on travaille a l‘union des nations“ balk dans l’intéret de leur pi'epa'e développement, une ration des Union des nations balkaniques en la Fédé Républiques des Balkans ». e> .ru Congres l.es memes idées ont été evprinré aprés la socialiste serbe .‘i Belgrade, en mai 191.;, un Bill— seconde guerre des Balkans, par Ï\l. Sal<asol , gare. Lapt< Le 1“ aout 191.1, retu> de voter les crédits. cl1evitclr iiistitie Cereli1s en disant : VUA}l.ll’le et la 5erbie, nations qui parlent des dialectes :—.ou « Que le GUL1\‘ÇI‘IM_U‘.UiL1111\‘L1lî pas fait tout lait avait qu‘il pti)ssible pour iii;tîiiteiiit' la paix, parce ee et de la Serbie un pont entre la litissie et la lian s est un instrument dont ces pa_\'s se servent pour leur ..tllïlit'Xt‘5 de la méme langue mére, nations dOnt les pl”Upïe> interets... ,, lig(\lîlelll' la perspective d‘une guerrefratricide entre la VIII ITALIE ‘ L‘Italie est certainement l‘un des pa_vs ou la ques— tion qui nous occupe est la plus intéressante à étu— dier. La difficulté d’exposer clairement la question \ieiit ici, non de la pénurie des renseignements, mais de leur abondance, et il faut faire etlort pour s’en tenir aux traits essentiels. C‘est que des le lendemain de la une Chambre de 508 membres; parmi ceux-ci 40 appartiennent au parti socialiste italien dit « officiel », 20 s‘intitulent socialistes réformistes et 10 sont des indépendants d’un classement malaise. Les réformistes comptent un grand nombre de personnalités remarquables par leur talent, leur élo— quence et leur caractère. Entre toutes, est particuliè— rement populaire et influente, celle de Léonida Bissolati, député de Rome. Ce groupe ne fut pas long à se décider. Il avait, des les premiers jours, appuyé vivement la déclaration de neutralité parce que l‘Ita— lie se dégageait ainsi des liens de la Triple Alliance et rendait un incontestable service a la France, ainsi pantplrh;ts et des brochures agitèrent la question de débarrassée de tout souci du côté de sa frontière méridionale. Mais cette première satisfaction obtenue, les socia— listes réformistes s‘occupérent aussitôt d’une active propagande en faveur de l‘intervention de l‘Italie pour soutenir les Alliés. La raison déterminante de cette propagande était la menace du danger que faisait cou— savoir si l‘ltalie abandonne—rait la position neutralistæ rir l‘impérialisme allemand a la démocratie interna- pour se ranger soir a côté des Empires Centraux, soit tionale. a la liberté des peuples, et a la civilisation a coté des ;\iliés. Les socialistes prirent naturellement une part tres importante a ces controverses. Au point de vue de la representation parlementaire, li s socialistes d‘ltalie comptent environ 70 députés sur européenne sortie de la révolution française de 1789. Le mépris de l‘Allemagne pour les traités, la manière sauvage dont elle poursuivait la guerre, ses constantes _ l_‘ \‘_“ …k‘…k 2 lu.)» Drstrn:i. En ][nÏ/e a:anl la _y…rnu. justifier leur these. Le péril slave les touchait peu et ils n’avaient pas de répugnance systématique pour la déclaration de la guerre européenne, l’Italie ayant proclamé sa neutralité, cette neutralité apparut a tous comme une solution provisoire et pendant dix mois, des discussions passionnées, des discours d‘hommes politiques, des articles de journaux et de revues, des violations du droit des gens, étaient naturellement, pour les socialistes réformistes, autant d‘occasions de ll.lilΑ. \ .il; QÇ_\1_ .... 7_1 __…. …_ 7)“ __ leur paraissait une guerre de défense, l’Italie étant d’esprit exigeant l’abstention de toute manifestation dans un sens ou dans l’autre. Certains étaient parti— directement menacée dans son existence, ses intérêts sans d’une neutralité absolue, d’autres d‘une neutralité guerre qui, d’ailleurs, dans les circonstances actuelles, et son idéal par les prétentions brutales de l'Alle— magne a l’hégémonie du monde. Les socialistes rèformistes se mêlèrent ainsi aux relative. Certains étaient partisans d’une neutralité inerte, d’autres d’une neutralité armée et menacante. Quant aux sympathies pour les belligérants, elles agitations provoquées par les démocrates, les radicaux, les républicains, les nationalistes, les irréden— tistes, dont les éléments bigarrés composaient le parti étaient dans le parti socialiste italien assez partagées; de l’interventitm. prestige allemand. Ces divergences disparaissaient lors— qu’il s’agissait de la Belgique: on peut dire qu’il y eut unanimité à condamner la violation de la neutralité belge et la manière atroce dont la guerre se poursui- Le parti socialiste italien dit officiel, de loin le plus important, et qui comprend toute la classe ouvrière organisée, eut une attitude tout à fait clillëreiite. Il se la majorité était favorable à la démocratie Française, mais une minorité importante restait sensible au voua au neutralisme par principe, l’hostilité irréductible a la guerre lui paraissant commandée par les resolutions des Congres internationaux. Les orateurs du parti et le grand quotidien socialiste l’A-wuîi vit en Belgique. lin novembre 1914, un certain nombre de socia- de“lendircnt avec acharnement l’opinion neutraliste. Cute opinion comprenait au reste une grande variete de nuances. On trouvait des camarades hostiles à toute ries neutralistes. Un journaliste de talent qui avait, listes du P. S. I. comprirent tout a coup le caractère émollient et pernicieux pour le prolétariat des theo— espece d‘action armée, même pour se defendre, et pendant deux ans, dirige avec bonheur l’Attmll, Benito Mussolini, dont les antecedents revolutionnaires le désignaient pour la lutte et pour l‘action, résigna brus— leur neutralisme allait iusqu’ir la théorie tolstoienne quement ses fonctions et londa un autre grand quoti— de la non resistance au mal. On en trouvait d’autres dieu socialiste, l/ Popo/u d‘Un/ia, ou il se mit a prCcher qui, cornmentant de vieux articles d’Hervé, souvent mal compris, niaient la Patrie et proclamaient qu’il avec une ardeur mystique la guerre immédiate et était indilitatnt pour un prolétaire, d’etre italien, allemand ou chinois. On en trouvait pour qui la nttnralite etait non seulement l’abstention des opéra— tions militaires.;, mais meme limpartialité de cour et nécessaire. Qui voudra compulser les collections de l’;lt'(ü1/ et d’]l ]’u_:ul/u d’I…/[u pendant les mois de décembre 19t4 a mai 1915 UUU\‘L‘I‘Ll, a co:e d’incidents person— nels et locaux. d’invectives supertlues et d'actualite's périmées, tout ce que la littérature socialiste peut ofi‘rir de notable dans la discussion de la guerre et de la paix. Mussolini fut solleennell ment exclu du pa1,ti mais il 11 en continua pas moins sa propagande et il serait puéril de niet quelle conserva un ca1act‘e1€ socialiste. Pendant les premiers mois de l’année 1915, parti— sans et adversaires de l’intervention provoquèrent de fréquentes manifestations qui dégénérèrent parfois en bagarres. A Reggio d’Emilia, il y eut des morts. Se battre pour ne point se battre, telle était l’extrémité paradoxale a laquelle arrivaient les neutralistes exci— tés. Au début de la guerre, les socialistes allemands et notamment le député Sudel;um vinrent solliciter les svmpatl1ies des camarades italiens, mais ces démarches parurent suspectes et eurent plutôt un résultat négatif. Plus tard. en avril 1913. lorsque la décision de l‘ltalie parut imminente, Gustave Hervé, au grand 10111 de la publicité, s’adressa 51 Turati, la personna— lité prépondérante du P. S. l,e tl’adjura d’abanlonnetl e neutralisme pour engageer l’Italie a défen— d1'te. a coté de la France et de l’Anglete1re la cause de la li l1etté des peuples et de a lémocratie en relatir, la cause de l’Internationale. La réponse de Turati semble indiquer qu’une certaine évolution s’est faite dans son esprit ‘. Elle s’est faite en même temps dans tout le parti et celui-ci a abandonné peu .‘1 peu l‘aspect agressif de son neutralisme primitif Il a renoncé, par e\emple , .‘1 toutes tentatives d epnpècl1e, par la grève générale, la mobilisation delarmee et il a laissé ”Italie se décider au mois de mai pour la guerre sans ess.1_\e1 de recourir '.‘1 l’émeute pour empêcher la 111.111itestation de loopinion nationale \é.unnoins il est demeure jusqu au bout insensil1le et meme hostile £1l.1 lièvre générale qui emportait lltalie vers la guerre. Dans son Congrès de Bologne, ap1ès avoir 1épudié, comme désltonorante. toute neutralite 1étril1uée, il a maintenu intévrale— ment toutes ses résolutions antérieures. Les révélations que tit un journal français. en juillet 1915, nous ont appris qu‘à ce Congrès de Bologne des offres daryent .1vaient été faites au parti socialiste italien p11 un personnage se disant .1mé1i— cain, et présenté p.11 le citt1_\en G1culicl1d/uricl1.ll faut constater .1 l honneur de P.S.l. que ces otltes furent déd.tl ?)«rneusement repoussées, mais il reste sin— gulier qu‘ells 11.11e111 point été portées .‘1 la connaissance du pit.1‘1icl l;urope . lurati répondit sans dissimuler sa sympathie pour la cause des Alliés et en faisant remarquer qu’il ct'o_\ait mieux servir. en 111ai11tenant un neutralisn1e 1. Voir dans mon vol unie Er; It121e.1111! 11 guerre, l‘inter— view de Turati. __73__ Ce fut Turati qui, lors de la discussion décisive du 20 mai 1915, justifia à la Chambre des députés l’atti— tude du parti socialiste refusant, malgré l’entraine— ment général, de voter le projet de loi accordant au Gouvernement les pleins pouvoirs contre la guerre. Et le surlendemain, 22 mai 1915, la direction du P.S.I. publiait un manifeste adressé aux prolétaires d’Italie, qui se terminait par les mots : « A bas la guerre! » « Vive le socialisme ! » et « Vive l’Interna— tionalel » Depuis que la guerre est déclarée, les municipali— tés socialistes des grandes villes se sont associées aux oeuvres d’assistance civile qui ont été la conséquence de la déclaration de guerre. IX BULGARIE Le parti socialiste était représenté a la Chambre, en 1912, par un seul député : Sal<asotî. Il refusa le vote des crédits de guerre en octobre 1912, en declaranr que les socialistes bulgares souhaitaient une confédération balkanique, non en vue de la guerre, mais bien en vue de la paix. Cette attitude tut consa— crée, aux élections de 1913, par un grand progrès des votes socialistes; de 23.000, ils passèrent a 107.000, et le parti fut représenté au Parlement par 37 membres. dont 16 radicaux et 21 opportunistes. La Ligue des paysans, qui avait été l‘organisatrice principale de la victoiree réclamait la démission de tous les ambassadeurs et oliiciers supérieurs de l’armée, l’organisation d’une République démocratique et d'une fédération des États balkaniques. Aux élections du 8 mars 1914, le Gouvernement reussir à enrayer les progrès du parti socialiste et a rendre vains les etions de la Ligue des paysans. Le ‘ bre 1914, a la Sobranie, le groupe socialiste, fil 10\'eiii lide‘le a sa tactique hostile a toute guerre, présenta ll n e double motion demandant : I” la convocation ___.80— d’un Congrès pour établir une Fédération Balkanique; 2° un appel aux nations neutres pour l‘établissement de la paix. Les députés appartenant à la fraction opportuniste, dont Sakasofifi votèrent la première par— tie de la motion, mais refusèrent de voter la se— coude. Nous ignorons quelle a été l’attitude des socialistes bulgares lors de l‘entrée de la Bulgarie dans la guerre CHAPITRE II ntxs LES PAYS .\‘lîL"I‘RES ()BSERFA TIONS GENERALES en octobre 1915 ; il est probable qu‘ils sont restés hostiles ii la politique royale. SOCIALISME ET NEL‘TRALITÉ Dans les pays qui n‘ont pas ete enti'aines dans la guerre, les sentiments socialistes sont evidemment moins interessants ft e…aa…—. mais il ne nous parait pas possible cependant de les nt-gliger complètement et de ne pas noter, tout au moins sommairement, la façon dont les soeialistes tle ees pays ont apprécié les evenements actuels. Comme partis organisé-s, ils iront pas eu a se pronen;er sur l’attitude a prendre tis-Ç—.—\'is de la guerre, puisque leurs gouvernements avant tie-title la neutralite. il ltur a sutli d‘ern‘egi>trer pl\w\l\etiïetït cette rt…i……. .\l;tl\ ee qui se passait bois de lCL‘.I'\ trt'nitieres etait \.lillîl interet trop unixetsel pû…“ len laîsser llltllllt‘l'pllb, et leur.» elrels et leurs Èournaux se \t)ll't trouves forcement amenes a indiqtmr th quel ç.;\-_ç etaient leurs synrpatlties et quels étaient les arguments par lesquels ils croyaient » pouvoir les itist;tîeï. i .... 52 ..... Avant d’examiner ces opinions, il me paraît utile de nous arrêter quelque temps à considérer, d’une manière générale, du point de vue socialiste, l’attitude neutraliste. On croit communément que cette attitude est normalement socialiste en raison même de l’horreur qu’a toujours professée le parti vis—à-vis de la guerre. Cette opinion me paraît complètement fausse et, à mon avis, le neutralisme est, au con— traire, aussi peu socialiste que possible. Lorsqu’une guerre éclate entre deux États, la souveraineté des autres États leur permet évidemment de déclarer qu’ils ne veulent pas y être mêlés et qu’ils resteront neutres. C’est un droit incontestable dans l'etat actuel de nos mœurs internationales. Mais _g3__ diats sont au fond de la proclamation de neutralité. Or, il suîlit de noter que si l’on avait raisonné dans la societe des individus comme on raisonne aujourd’hui dans la societe des nations, nous en serions encore a la barbarie primitive. A mesure que les hommes sont sortis de l‘etat sauvage et ont vécu en groupes plus ou moins organisés, ils nout pas tardé à comprendre que certaines actions, aidant a la satisfaction des passions individuelles, etaient corr— traites a la prosperite du groupe. Des notions confuses de morale se sont ainsi elraucliees. On a declare quil etait mal de tuer, de blesser, de depouiller les freres de la tribu, puis, comme ces actions se repro- téresse en rien les États neutres et dans ce cas l’in— cltïisaient en depit de la prohibition, on a constate" la necessite de donner a c‘es olligation» une sanction elÎective. et le Droit lut ainsi cree, par lequel la force de tous s'engageait a intervenir dans les conllits indi— \idtiels Min de proteger la l.1iblesw iiiiptiiss;tiite‘ a se diliérence est légitime, non seulement au point de klélk'llklÎC par elle-iiieme. Les societes litunaines purent vue du droit international présent, mais a un point ainsi se Ç(‘ll\ililiel' et se developper. Nous ii‘;t\ons pas encore atteint ce degre de ci\ilisation dans les socittts des nations; sans doute, nous sommes deja l’usage de ce droit ne peut s’expliquer que par des raisons d’indifiërence, d’égo‘isme, de lâcheté ou de faiblesse. On peut concevoir des cas où le conflit n’in— de vue moral supérieur. Par contre, il arrive souvent que le conflit intéresse considérablement les neutres. non seulement dans leurs biens matériels, par voie de répercussion indirecte, mais dans leurs biens mo- arrivÇ« a cttte premiere periode … des regles mo— raux, leurs sentiments et leurs espérances. Dans ces . . . . , , droit du îî.lîluîl\ est :luem‘:q:igrneitt pm;…ure et la dernieres éventu:tlitë5, la neutralité est simplement l'expression du désir de ne pas participer au combat etd° être préservé de ses risques ; la peur des coups tl le souci le plus bas des avantages matériels immé— t‘.tlcs (nil e'.e edîctees par ll … conscience de tous. le 1LîLlîl'.cît' cl=‘Îli .e‘\ …: tir,», au elles ptu…ut .l\lrll entre \l ‘ ' ‘V ' A Lllt‘\, do:1 \; ‘vltÎtl. e‘—L :luoi'iquement et meme n:inutî:u:ezr:ertt re'g‘;tc par des con‘*-e:rtiom interna— tionales, :rozanunmt celles de La Haye. .\lai> toute _£/ _54_ 5 .— \ sanction edective fait encore défaut et l’administra— tion de la justice, organisée entre les hommes, n’est pas encore organisée entre les nations ; elle ne pourra létre que lorsque la force de tous interviendra pour protéger la faiblesse impuissante à se défendre par elle-méme. “Pour atteindre a ce développement supérieur de civilisation, il parait donc indispensable qu’à l’avenir l intervention soit la régle et la neutralité l’exception. A quoi sert de proclamer gravement des maximes de droit international s’il est entendu, en même temps, que ces maximes ne peuvent être violées lorsqu’elles apparaissent génantes, et s’il n’est pas expressement convenu que les cosignataires de ces Conventions internationales, s’engagent, non seulement a les respecter, mais surtout a les faire respec— tcr par les autres ? _Ïe sais bien que dans certains cas extreme, cette façon d’entendre le droit interna— tional peut mener a la guerre, mais l’action armée est :cr, la con iition même du progrès et l’indispen5-aele n‘;(jtveii de prévenir dautres guerres, d’autres violences et d’autres injustiCes. ll n est pas un socialiste qui, désirant la paix entre les nations et le reglement des contestations interna’.H'rîiflîefi par voie d‘arbitrage, ne doive admettre la coiîlstnuiion dune force capable de faire exécuter les îdeùsrons des arbitres et de mettre les re’calcitrants & .a raison. ll ., ., ,_ J .. . _ le…: vu cette matiere encore, substituer a la doc trine bourgeoise du chacun pour soi, la règle socia— liste du chacun pour tous et du tous pour chacun. Il serait ridicule et contradictoire de proposer la soli— darité des individus et de reieter la solidarité de nations. ;\u surplus, il suffit de se rappeler l’action con— stante du socialisme dans les dille‘rents pays depuis une vingtaine d’années, pour se rendre compte que c’est bien dans la voie de l’intervention et non pas de la neutralité. que se dirige instinctivœnent la pensée des partis dÏ vant—garde. Nous les avons vu in;inilestei' bruvarnrnent chaque lois que des oppri— mes leur adressaient un appel désespéré: pour les .-\rinéniens inassicres, pour les iiiifs persécutés en l’\t1\sie, pour les Finlandais privés de leurs droits, ' l pour les Polonais privés de leurs li'ñertes. pour les l3r>ei's dl\ti'iqtie, pour les libres penseurs d’lîspaune lors de l’ati‘tire lierre-r, etc., etc. Sans doute, dans ces diriérents Ç;l.\_ il ne s‘agissait que de martin—stations \'e:‘i\iles, discours. ii:eetinp. proclanratitins, ordres du Ïour. .\l.iis il li ut supposer que la sincérité deces clé!ii«‘iisti1ttiriii\ en: c—:r— plus loin si les manifestants en avaient en le pursuit. Qae \L‘Z'.‘.l'rll arrive. par e'fveiiiple, si les socialistes avaient c… Ïes ::1.11t:'es dans un ou plusieurs des litats o… se patit'siii\:iiUït Ïes propagande-s dont ie viens de p.11ici‘? l.’U‘Iïiîliilll î1’c‘LLÎ-Lil'c' point exige di gouver— Ilclîleîiî une .1cîiu'.i desîlîlÇe a lui donne.“ des satisfac' —vrÇ ‘ v } :r … i r ' . l tions p:……,i.es. l-. aa»‘ adT.1.e'îï… pu dire .nozs- les L‘.l!-— '…‘Îsa'is de la vn-ntt';iiiré \vsréniatinne? 11 me paraît donc évident qu’en raison de 121 générositü de son 111é31, en r:1150n 11e1z11oi qu ’11 s 1‘stfz1ite 111 111‘1'6111‘11'6 tous 1es opprimes, 11‘ p;11t1 socia1iste se trouve 1rrés1stib1emcnt entrainé vers 1’111te1‘\'111t1011. Ce sera peut-être 1’une des conséquences bienf 1santes 111‘ 111 terr1b1e tourmente 11"111110111111…1 que 11111111111t1011 progressive 11e1'1tte conception. Au surp1us,11111eu1ntion 11;1— t—e—11e pas été 111 1101t:11111 5011311516 111' ces de1n1è1es années lorsqu’11s’sagit 111s1ra1110115 du capita1 et du trami1.3 Le neutra1isn11 111111 1011\ en11 aux économistes bourgeois, mais les soci:11istes se sont toujours efïorcés en revanche 111 p1ot1'qer 1es L11b1ss1s 111111V1‘11UC11€S par 1’111terven— 111111 de 1État. 111111n j;1jouterai que 1e neutralisme en tant que 1io1trine 151 une doct11ne 111111p111551111€ d’1neu1e 1t 11e 1'1s1g111111011. A cet 15111111 non p1us, e11e n’a rien de socia115tc puisque le soeia1isme s’est toujours 1'1101'1é 110 111111 z1ppe1 21 l’esprit d’énergie et de 1utte du 111011-131'1111 non seu1ement pour 121 conquête d’un 11111111111 313111 mais aussi et surtout pour la 1011q111t1 111' 1111151111“ 011 a beaucoup 113111 de la banqueroute socia1istc _1’—lîd it 111121 10111111'e11 1e 1111111' me pamiss1it\idt. Mais 11 101111551 un1 certain1 fi1i11ite de 11 qu on pou1uit ;11t111111C du socia1isme lorsque nous devro ns 11'111St1111'1‘, ainsi que nous ;111ons1c faire, q ue dans (um… 111—s p.1_\.\ 115115 111'UU'CS, les partis SOC1zI115ÈCS n’ont eu 1 . . 11‘ 111111;1g1'7 , " 111—. bra\el'1’11npopu1ar1të en reclanmut 1 111- tervention Ils se sont soumis doci1ement aux prudentes et parfois intéressées consim1s de neut1a1ité, conformément à 1eur mi1ieu, et 11111 1111 park 111 justice et de générosité. —89— toires. La violation de la neutralité belge avait sans doute indigné la plupart d’entre eux. Mais, d’autre part, le prestige de l’Allemagne était très grand, en raison de sa puissance économique et militaire et, chez les socialistes, en raison de la force de ses orgaHOLLANDE nisations ouvrières, de l’enseignement de ses théori— conserver la plus scrupuleuse neutralité, et le triste sort de la Belgique lui a montré, par la suite, tout le danger qu’elle courait de devenir le champ de bataille entre l’Allemagne et l’Angleterre. Son gouvernement a donné les instructions les plus minu— ciens. Le journal socialiste Het Vol/c reflète les diver— gences d’opinions qui se sont manifestées dans le parti. Certains de ses adhérents persistent à se mone trer hostiles à tout militarisme quelconque et estiment qu’il n’y a pas même lieu d’organiser la défense nationale. La majorité, au contraire, comprend que pour maintenir la neutralité et éviter les horreurs de la guerre, il faut pouvoir se défendre. He! Vol/c publie alternativement les articles destinés à inspirer le respect et même la crainte de l’Allemagne, et tieuses pour ne pas être exposé a un reproche quel- d’autres articles ou les agissements de l‘Allemagne conque et il a même cherché à obtenir de la population une très grande discrétion dans la manifestation de ses sympathies. Cela n’a pas empêché, néanmoins les Hollandais d’accueillir avec beaucoup de genero— srté et de cordialité les Belges chassés de leurs f0vers, lors de la chute d’Anvers. ' Les socialistes de Hollande ont suivi les indications données par leur gouvernement. Il leur eût été d’ailleurs difficile de préciser nette— sont sévèrement cettsurés. Il ne s’est pas gêné, par exemple, pour dire quelques vérités désagréables aux socialistes allemands. Dans les premières semaines de la guerre, ou a accuse la Hollande de complaisance envers l’Alle— magne. Rien n’était moins justifié. La Hollande, directement menacée, s’est uniquement souciée de ment leur avis, car les opinions étaient très parta;;ees et déterminées par deux influences contradic» Un désir très vif de paix, de paix a tout prix, sans vainqueur ni vaincu, et sans annexion ni conquêtes. parait exister chez la plupart des socialise5 hollandais. Au point de vue socialiste, ils souhaitent le rétablis— sement de l’Internationale ouvrière et désirent ne pas prendre une attitude trop nette, afin de pouvoir maintenir leurs bons rapports avec tous les belligé— rants et d’être ainsi, un jour, les artisans d’une récon— ciliation des classes ouvrières des dili’6rents pavs. Le leader des socialistes hollandais, Troelstra, fit un voyage a Berlin dans les premiers mois de la guerre. Il y vit des compagnons allemands et eut un entretien avec M. Zimmerman, sous—secrétaire d’État aux alïaires étrangères, qui lui déclara que l’Allemagne n’avait pas l’intention de porter atteinte a l’indépendance de la Hollande, mais qu’il y aurait lieu d’examiner, plus tard, l’éventualité d’un rapprochement économique. Troelstra ne lui cacha pas ses appréhensions au sujet de ce projet; et, à son retour en Hollande, il les rendit publiques et publia une série d’articles dont la conclusion était nettement hostile à l’impérialisme allemand. N’en de‘duisez point, cependant, qu’il soit lavorable aux alliés. Il prétend rester neutre, dans l’es— poir, ainsi que je viens de le dire plus haut, de mieux servir, dans la Suite, la cause du socialisme interna— tional. D’autres notabilités du parti se sont prononcées plus ouvertement. Le 28 février 1915, dans une con— férence faite a La Haye, le député socialiste Vliegen, échevin d’Amsterdam, a dit que tous les socialistes étaient unanimes à condamner la politique allemande en ce qui concerne la violation de la neutralité belge et la campagne de presse menée en Allemagne pour justifier l’annexion de la Belgique. Au cours d’un voyage en France, le sénateur ll. van liol, personnalité éminente du parti, avait exprimé, sans ambage, son voeu de voir la victoire des Alliés et son indignation de l’invasion de la Bel— gique. Cette attitude parut contraire a la. neutralité et mécontenta certains membres du parti qui réclamérent des explications. Van Kol les fournit dans HN Vol]; du 18 mars 1915. Il revendiqua le droit de dire librement sa pensée : « Ce que j’ai dit a Paris, je l’ai d’ailleurs déjà écrit à différentes reprises à Berlin. La première fois, j’ai invité le président de la traction socialiste du Reichstag à visiter avec moi les territoires occupés en Belgique par les Allemands. Plus tard, dans l’intérêt de l’Internationale, j’ai fait un appel pressant a ses sentiments de socialiste, pour qu’il fit entendre une protestation, au Reichstag, contre l’injustice commise à l’égard de la Belgique, protestation qui a été faire par le docteur Haase, le 4 décembre 1914. Je n’ai pas donné suite a la demande qui m’a été faite par des journaux socia— listes francais de donner mon opinion sur la guerre, mais revenu dans la paisible Hollande, je me demande si la direction du parti socialiste n’est pas devenue trop exigeante en matière de neutralité. « En socialiste peut-il et doit-il se taire quand son Sentiment de justice est blessé par la violation du droit des peuples, la lacération des traités, le mépris des promesses? Ne peut-on pas exprimer, comme socialiste, son indignation? Doit-on s’imposer le silence quand on a été le témoin de cruautés qui déshonOt‘ent l’humanité? Nos. sympathies ne peuvent-elles plus aller aux opprimés ou ne pouvons— nous plus les exprimer, uniquement pour épargner les oppresseurs? Quiconque, dans des cas pareils, ne proteste pas avec toute la force qui est en lui, devient ainsi complice du crime, porte en partie la responsa— bilité des cruaute's commises et se rend coupable de lâcheté morale. » Le rédacteur chargé d’apprécier chaque jour les événements militaires dans Ht}! Vol/r est plutôt favorable aux Alliés. ll exprima, en avril, l’espoir de voir l’Italie intervenir dans le conflit. Et blâme, pour cette opinion, par un membre du parti , il répliqua en la maintenant et en démontrant qu’elle ne contredi— sait pas le sentiment des partisans de la neutralité hollandaise et de la paix rapide : « l’ent rée en lice de l‘Italie lui paraissait devoir permettre d’arriver plus promptement a une solution définitive et satisfaisante pour les démocraties. » II DANEMARK J’ai peu de renseignements sur l’état de l’opinion socialiste dans les pays scandinaves. Il semble bien que la situation y soit très analogue a celle ,de la Hollande : volonté de neutralité, prestige de lorga— nisation allemande, sympathie pour la Belgique envahie, espoir de reconstituer l’Internationale. Au Danemark, les socialistes comptent, a la Chambre des députés, 32 sièges sur 114. Au début de la guerre européenne, ils ont publié un nmnrleste réclamant la neutralité pour leur pays et ident1hant la cause du socialisme et celle de la paix. Quand Georg Brandès écrit a Clemenceau qu’un gouvernement danois qui a encore une parcelle-de bon sens ne s’engagent jamais dans la guerre sr le pays n‘est pas menacé, il exprime incontestablement l‘opinion de la grande majorité des habitants de ce pavs. L’organe des socialistes danors Soral! Dunant/cu est également absolument opposé ‘1 toute participa— tion à la guerre. , Dans le congrès tenu par le Parti au debut d oc? tobre 1915, le citoyen Stanning rappela que le Paru —94 _. avai. t soutenu le gouvernement radical aim de main— tenir' la neutral ne et avait été amené ainsi à voter les credits militaires nécessaires. Cette attitude ne donna lieu a aucune observation. III SUEDE Aux élections de 1914, le parti socialiste conquit 87 sièges sur 230 que compte la Chambre des Députés. Cette importance parlementaire eut pour résultat d’amener les socialistes suédois à discuter, vers le mois d’octobre 1914, la question de leur participa— tion au pouvoir. La guerre européenne passait à l‘ar— rière—plan. Comme les classes dirigeantes sont, dans ce pays, ouvertement hostiles à la Russie et favorables à l’Allemagne, le parti socialiste suédois, tant par réaction contre les influences bourgeoises que par système, se prononça énergiquement pour la neutralité; il publia un manifeste à cet égard, appuyé de considérations générales qui ne présentent aucun caractère spéciale— ment intéressant. Notons toutefois que M. Karl Branting, éditeur du journal Serial Dumo/crn/m, s’est prononcé, à dit— lerentes reprises, avec la plus granoe ener’2—‘ÏU: pour les revendications de la Belgique oppi‘iméC- V \Olà\\‘l ( :lî SUISSE ',‘J…‘lll\lt r cl :u111".iÏ%1c. .\u 1'-' .' … l‘Δ. \iku..llC "i:l.1:ÎL\. Qa..iîid . .., La situation de la Suisse ressemble, sous divers rapports, a celle de la Hollande. Les autorités s’y sont préoccupées, avec une prudence extrême, de mainte— nir la neutralité, et cette préoccupation s’est reflétée ÎLÏ'.llkîit \ ..‘\ .;r—…:::lwt:r;1 ct cuil p1'ClÇ-z'.tit l “ardt inc p.uuut \îLLiiiiitvns. l…i l‘ l » fîcLlîl';lrltc dc— sar1ntc. Çc.lt* de …i l)clg_1ci.t t….i …… ncutialtc Lâ"".‘.Ç‘e Ct 05.1ng de \'L‘ t.tït’l‘.Lli'c'. (JlUÎ\ÎL'lÎÎ SCSΓll - , ,alrc i._ 1 ;c- noir.; i:ï:pz'Lutïet' de la nicnt.ilite mande. qu’1lconsuiure c…m:t:e superl… lc 1L\}KLÎ des engûgdlîelïb ? ‘ — , lill\\k chez les socialistes d’autant plus facilement qu’elle s’accordait avec leur horreur de la guerre. Quant aux appréciations exprimées sur les événements, elles sont encore plus nuaiicees qu’en Hollande, à raison de la coexistence des trois grandes langues européennes : allemand, français et italien, dont l’usage entraîne presque fatalement des difi‘e’rences de points de vue. Ajoutons que le parti socialiste, en Suisse, a surtout une organisation et une activité canto— nales, ce qui rend parfois malaisée la création d’une opinion nationale. Au début de la crise euro— péenne, tous les journaux socialistes suisses ont qualifié très sévèrement l’ultimatum de l’Autriche à la Serbie, et les organes de la Suisse allemande ont exprimé l’espoir que l’Allemagne pourrait imposer la paix. Ils ont recueilli alors les déclarations des jour/. ...s :‘…111\ soci.:’istcs L1litliî.l‘.‘ttl\ l‘oxi‘lcs‘ .i '… ;1nc1‘t'c. Mars, , . \ ’t""\v"t‘.k …\.\1‘.‘.iuiic t‘tc..t‘ …i. t'iln.i.t . . .. ..1 lui…… , . . ‘.iLÇ du ‘..1 pitsw socialiste us.! et la mm…… ne ..1 >L.incc du liticlzxi.iu du \ .‘.utit. appro…ant l.t viol.itiyn dc Î.titctiii'.ili1t' litige. contribua a acc…ttu-r guerre européenne n’est pas une lutte pour une civi— lisation supérieure et pour la liberté des peuples. Elle est à la fois une lutte des classes capitalistes pour la conquête de nouveaux marchés en pays étrangers et une tentative criminelle d’abattre dans chaque pays ses dï\tr;tncts. (’ti1.iiits icurn.tux. tt notamment le mouvement révolutionnaire organisé. cc;.x du l.i Stiis«r .tllclll‘ilîvlt'_ partntnt uniquement >c:i>îi\Ïts .‘.1‘. pÇiîl t;’.‘.‘.'i\ic‘ tandis que d’autres, surtout « Les bourgeois d’Allemagne et d’Autriche n’ont pas le droit de dire qu’ils luttent contre le tzarisme, aux de la St:is>c i'ttiiî.‘.îidc. tlt'nonçirtnt avec indi— v ! ut‘aiiun l’.‘illl‘t‘tîtlc‘ de l’.\:.tnxitint. Î\l.1Îs Iiït11‘.u dans la car ils ont toujours fait une politique favorable au maintien du tzarisme agresseur. Ils ont ainsi entravé F-tiissc ;tÏlcn‘..irtÎt—_ ;tttc .t‘.‘.itiidc ltit an:Çrcincnt criti— .Ï . nzalgrÇ ses relations C"LÇ Le Î"=' irii"v dc l‘ ‘. Ctroins avec lc.» >ociaiî>ics :… cin;nn &, s c‘st prononce, le développement de leur propre nation. Les bourgeois anglais et français n’ont pas non plus le droit, .‘t plt‘.sittirs reprises. contrt l’.»\llunagne et Contre i des cluis s«»cialî>1wal'.cnt.nuls D’autre part, car, par leur alliance avec le tzarisme russe, ils ont en défendant leur pays contre l’impérialisme allemand, de prétendre lutter pour la liberté des peuples, les Cic“iiicitts les plus avancés du parti, les Nettlcltit— favorisé ce dernier et entravé le développement de la tellois, par cXciiiplc, tout en >oultaitant la victoire des Allics. accentuent leur position antiurilitariste et in>istent sur la l'cspc1‘ôtll‘lllîé‘ de tous les gouverne- civilisation. n:ent> capitalistes dans la politique des armements; guerre, libérer les prolétaires des autres pays. Aucune ils ont approuvé la politique neutraliste du parti socia— liste italien oilictel. Le 27 septembre 191.r, a Lugano, eut lieu une réu— nion des i'tpi‘Csc-ntaiits des partis socialistes d’Italie et de Suisse. lls adoptL-rent une résolution dont voici lcspassages USSCl‘iîlc‘l5 : << La présente catastrophe est la conséquence dela politique impérialiste des grandes puissances, politique qui, dans les monarchies abso— lutistes, se confond avec les intérêts dynastiques. La guerre ne peut avoir pareil eflet... » « Une partie de la classe ouvrière est entraînée par les menées chauvinistes et croit, en participant à la Les signataires de cette déclaration dénonçaient comme criminelle toute tentative d’extension de la guerre à d’autres pays et invitaient les partis socia— listes d’Italie et de Suisse à réclamer de leur gouvernement l’intervention par voie diplomatique, dans le but de mettre fin au massacre. Le 1er novembre 1914, le parti socialiste suisse se réunissait en Congrès à Berne. Il y vomit, à l’unani— — ](i() — nine, une resolution d‘un esprit analogue a celle que nous venons d’examiner; mais ou nous trouvons en plus une protestation contre la \iol.itioii de la neu— tralité belge et une opinion sur la paix : la paix du— rable selon eux n’est possible que sur une organisa- VI tion sociale basée sur le collectivisme et la pro— ESPAGNE pl‘iëté. Ces résolutions sont les seules manifestations du parti socialiste connue tel. Depuis, les opinions pa— rziisserit avoir évolué dans un sens plutôt favorable aux Alliés. La crainte du péril russe a diminué à rai- On sait que ce pays est en très grande majorité favorable aux Allemands. Les Alliés ne comptent guère de sympathie que parmi les partis avancés. Le seul socialiste de la Chambre espagnole, Pablo son des insuccès des opérations militaires russes. La barbarie des procédés auxquels ont eu recours les Allemands leur ont aliéné bien des sympathie-s; la publication du volume de M. \\"axxveiler, La Belgique neutre &! [am/u, a accentué l’indignation causée par la conduite de l’Allemagne a l’égard d’un petit pays dont la situation internationale était analogue à celle de la Iglesias, a Fait connaitre ainsi son opinion : il estime que, comme socialiste, il doit défendre la thèse de la neutralité et que l’Espagne ne peut songer à la guerre aussi longtemps que l’intégrité de son territoire sera respectée. Si elle ne l’était point, il considérerait comme un devoir pour tout Espagnol de la défendre par les armes. La conviction neutraliste ne l’empêche Suisse; enfin, les declarations réitérées des gouver- nants de France et d’Angleterre ont fortifié l’espoir pas de souhaiter le triomphe des idées de liberté et de démocratie que représentent la France et l’Angle— que la victoire des Alliés serait la défaite du milita- risme et la consécration de la liberté des peuples. terre et l’écrasement de l’impérialisme austro-germain. Malgré cette sympathie ouvertement procla— mée, il considère que ce serait un crime que d’engrger l’Espagne dans la guerre. \‘II VIII PORTUGAL ROUMANIE Les socialistes portugais se joignirent aux radicaux pour publier, le 6 octobre 1914, un manifeste récla- Les socialistes roumains ont également défendu la thèse de la neutralité. Deux mois après la déclaration mant la stricte neutralité de leur pays dans le conflit de la guerre européenne, ils publiaient un manifeste eur0peen. mettant les travailleurs en garde contre la propagande russe. Les agents du Tzar, disaient—ils, essayent de se cacher en exploitant la sympathie pour la démocra— tie française, ils veulent ainsi nous engager dans la guerre; or, de tous les dangers, le danger russe reste le plus grand. Au mois de janvier 1915, le citoyen Racovvslry, membre roumain du Bureau socialiste international, confirme la position neutraliste de son parti, mais dans l’Humani/c' du 17 juin 1915, il se trouve amené a protester contre les accusations qui représentaient les socialistes roumains comme vendus a l’Allemagne, après la visite du député Sudekum : on a mal inter— prété le voyage que fit le citoyen Racovvslty en Italie en le considérant comme ayant un burgermanopl1ile_ S’il a parlé de l’impérialisme allemand, c’est pour le condamner; s’il a parlé des socialistes allemands, c’est VII \"Hl PORTUGAL ROUMANIE Les socialistes portugais se joignirent aux radicaux pour publier, le 6 octobre 1914, un manifeste récla- mant la stricte neutralité de leur pays dans le conflit européen. Les socialistes roumains ont également de”endu la thèse de la neutralité. Deux mois après la déclaration de la guerre européenne, ils publiaient un manifeste mettant les travailleurs en garde contre la propagande russe. Les agents du Tzar, disaient—ils, essayent de se cacher en exploitant la sympathie pour la démocra— tie française, ils veulent ainsi nous engager dans la guerre; or, de tous les dangers, le danger russe reste le plus grand. Au mois de janvier 1915, le citoyen Racowsky, membre roumain du Bureau socialiste international, confirme la position neutraliste de son parti, mais dans l’Hzmzmzi/c' du 17 juin 1915, il se trouve amené a protester contre les accusations qui représentaient les socialistes roumains comme vendus à l‘Allemagne, après la visite du député Sudeltum : on a mal inter—prêté le voyage que lit le citoyen Racovvsky en Italie en le considérant comme ayant un but germanopl1il €. S’il a parlé de l’impérialisme allemand, c?est pour le condamner; s’il a parlé des socialistes allemands, c’est pour les desapprouver. Il a, au contraire. défendu la France quil a tomours aimée, contre les réaction— narres de son pays et contre tous ceux qui suspec— taient ses intentions démocratiques. CHAPITRE III LES CONFERENCES INTERNATIONALES La guerre était encore a ses débuts que, de divers côtés, on émit l’espoir qu’une réunion Socialiste internationale pourrait contribuer a y mettre fin. Ce fut surtout dans les pays neutres que ces espérances se manifestèrent, et les éléments socialistes en furent naturellement l’expression. En octobre 1914, le parti socialiste d’Amérique prit l’initiative d’un congrès de la paix et s’ofi”rit géné— reusement a en supporter les dépenses. Sans vou— loir examiner de quel côté étaient les torts, il conju- rait les socialistes de rester fidèles a leurs déclarations pacifistes et de s’employer pour mettre fin a des mas— sacres qui ne pouvaient profiter qu’aux classes diri— geantes. Vers le même temps, les partis socialistes de Suisse et d’Italie demandèrent a leur gouvernement d’interposer leurs bons offices en vue d’une discussion de la paix. (Meeting de Lugano, 27 septembre 1914, voir page 98.) Mais ces initiatives furent accueillies froidement par les socialistes des pays belligérants. ]m/[ce déclara — 106 —— qu’il ne pouvait être question de discuter, avec quelque chance de succès, les conditions de la paix, aussi longtemps que les troupes allemandes ne seraient pas chassees de Belgique et de France._lean Longuet, dans lHuHinth'ir', entit. au nom des socialistes fran—- de diplomatie socialiste, agissant parallèlement à la diplomatie officielle, mais dans le sens de la démocra— tie et de la liberté. Ce besoin de conversation était tellement impérieux que la force des choses finit par lui trouver des gais. la même opinion formelle. Et les choses en restèrent la. J‘ignore si les socialistes allemands répondirent a la proposition américaine. Ces aspirations généreuses étaient prématurées. Les e>prits n‘étaient pas préparés .‘t examiner une éven— tualité quelconque de paix. Et toute action interna— tionale, avant la paix pour objet, devait fatalement échouer. On aurait peut—être mieux réussi et plus utilement travaillé si l‘on avait essayé, plus simple— satisfactions. Ce furent d’abord les socialistes des pays neutres qui se réunirent a Copenhague en jan— vier 1915. Puis, il y eut à Londres, en février 1915, une conférence des socialistes des pays alliés. Et en— fin, les socialistes allemands et autrichiens expri— mèrent a leur tout leur manière de voir dans un ordre du jour. ment, de multiplier les rapports entre les socialistes des divers pays. Tous ayant une tendance commune doivent pouvoir se mettre d’accord, après discussion contradictoire et échange de vues, sur un certain nombre de points. Une fois cet accord établi, chacun des délégués pouvait, en retournant dans son pays, La Conférence déclare que le capitalisme, dans sa l‘y faire connaitre et s’employer a sa réalisation pra— tique. lin temps normal, ces ententes sont exceptionnelles, mais la facilité des communications et l’échange des journaux permettent de suppléer à leur insuffisance. En temps de guerre, alors qu’elles eussent été beau— coup plus utiles, elles se trouvaient presque impos— sibles par suite de l’isolement quasi absolu de diffé— rents partis socialistes. l…’Internationale ouvrière aurait pu créer une sorte Voici le compte rendu des résolutions votées a Copenhague forme impérialiste, accompagné par l’accroissement ininterrompu des préparations militaires et la poli— tique d’expansion sans limite, en même temps que la diplomatie secrète et sans contrôle des grandes puis— sances, a jeté le monde dans la catastrophe que la Social démocratie avait prévue et contre laquelle elle s’est continuellement élevée. Le Congrès de Copenhague tenu en 1910 a résumé ces principes d’une telle manière qu’il engage les membres socialistes des corps représentés a: A. Travailler à l’établissement de cours d'arbitrage international. B. Demander une limitation des armements avec, comme résultat définitif, le désarmement absolu — 108 —— C. Demander l‘abolition de la diplomatie secrète __ 109 ..... quète afin d’examiner jusqu’à quel point, soit par et la publication de tous les traités et de toutes le s leurs propres efforts, soit en connexion avec les gou— conventions existant entre les gouvernements, et vernements des autres contrées neutres, il pourrait essayer avec chance de succès leurs pouvoirs de médiation pour terminer la guerre et établir, à bref délai, une paix définitive. D. Agir en faveur du droit de tous les peuples de décider de leurs propres destinées et de défendre ce droit contre les conspirations militaires et l’oppression brutale. La Conférence cependant considère du devoir de tous les partis socialistes de travailler en vue de la conclusion d‘une paix rapide et. dans ce but, d‘user de tous leurs pouvoirs pour formuler des proposi— La Conférence des socialistes alliés, à Londres, adopta les résolutions suivantes : La Conférence ne songe pas a méconnaitre les causes générales et profondes du conflit européen, produit monstrueux des antagonismes qui déchirent tions de paix qui ne portentpas en elles le germe de la société capitaliste et d’une politique de colonia- nouvelles guerres, mais qui constituent une base pour le désarmement international et pour la démo— cratisation des politiques étrangères. La Conference proteste contre la violation du droit des gens commise contre la Belgique et exprime son souhait que la démocratie socialiste de toutes les con- lisme et d’impérialisme agressifs, que le socialisme international n’a cessé de combattre et dans laquelle tous les gouvernements ont une part de responsabi- entière énergie pour arriver le plus tôt possible à la paix du monde. lité. Mais l’invasion de la Belgique et de la France par les armées allemandes menace l’existence des nationalités et porte atteinte à la foi des traités. Dans ces conditions, la victoire de l’impérialisme germanique serait la défaite et l’écrasement de la de'— mocratie et de la liberté de l’Europe. Les socialistes d’Angleterre, de Belgique, de France, de Russie ne poursuivent pas l’écrasement politique et économique de l’Allemagne. Ils ne font pas la En même temps, la Conférence charge la démo— guerre aux peuples, mais aux gouvernements qui les cratie socialiste de tous les pays neutres, par les moyens parlementaires ou par d’autres moyens utiles, de soumettre a leur gouvernement respectif une re— oppriment. Ils veulent que la Belgique soit libérée et trées belligérantes proteste contre chaque infraction des droits inaliénables que constituerait une annexion forcée. La Conférence, en outre, fait appel a tous les tra— vailleurs de tous les pays afin qu’ils concentrentleur indemnisée. Ils veulent que la question de la Pologne soit résolue, conformément a la volonté du peuple f—— 110 -… ——III— polonais dans le sens de l‘autonomie au sein d‘un autre litat, ou de l‘indépendance compléte. Ils veulent que, dans toute l‘Europe, de l’Alsace-Lorraine les difle'rends entre les nations par des méthodes de conciliation et d’arbitrage obligatoire, et pour impo— aux Balkans, les populations annexées par la force recouvrent le droit de disposer librement d’elles— mêmes. lnflcxiblement décidés a lutter jusqu’à la victoire pour accomplir cette tacle de libération, ils ne sont …5 moins résolus a combattre toute tentative de translbrmu' cette guerre de défense en une guerre de conquête, qui préparerait de nouveaux conflits, créerait de nouveaux griets, livrerait les peuples plus que jamais au double fléau des armements et de la guerre. Convaincus d‘étre restés fidèles aux principes de l‘Internationale, ils expriment l‘espoir que bientôt, reconnaissant l‘identité de leurs intérêts fondamentaux, les prolétaires de tous les pays se retrouveront unis contre le militarisme et l’impérialisme capita— liste. La victoire des Allie' 5 doit être la victoire de la liberté des peuples, de 1, unité, de l’indépendance et de l’autonomie des nations, dans la Fédération paci— fique des États-Unis de FEurope et du monde. A la conclusion de la guerre, les ouvriers de tous les pays industriels auront le devoir de s’unir dans l'Internationale en vue de supprimer les diplomaties secrètes, de mettre fin a l’influence des intérêts du militarime et des fabricants d’armements et aussi d’établir un organisme international capable de régler ser a toutes les nations l‘obligation de maintenir la paix. La Conférence proteste centre l’arrestation des dé— putés de la Douma et contre la suppression des jour— naux et les condamnations des journalistes russes, ainsi que contre l’oppression des Finlandais, des Juifs et des Polonais russes et allemands. Enfin, les 12 et r; avril 1915, les représentants de la démocratie socialiste d‘Allemagne, d‘Autriche et de Hongrie eurent 51 Vienne un échange de vues dont le Vorteaerîs, du 20 avril, résume ainsi le sentiment unanime : « Malgré la longue durée de la guerre, les peuples de tous les pays sont inllexiblement résolus a défendre, de toutes leurs forces, leurindépendance. La guerre inouïe en extension, violence et durée, a répandu sur l'humanité une détresse efli‘ovable, anéanti des millions de vies, détruit des richesses sans nombre que le travail des générations avait accumu— lées. Les prédictions des chefs socialistes qui disaient que la concurrence des armements devait mener a une catastrophe mondiale se sont réalisées. C‘est naturellement le prolétariat qui soullre le plus. Il laut que dans tous les pays, belligérauts ou neutres, croisse le désir de voir latin de la guerre. « L‘approche du jour de mai doit, plus que jamais, remplir du sentiment de solidarité, les coeurs de tous les travailleurs conscients. Les partis démocrates ——II2-— —113— socialistes, qui ont toujours travaillé en faveur de la 19t5. Elle avait été convoquée contrairement à l’avis u Bureau 50cialiste international, et les délegues qui fraternisarion des peuples, sont les annonciateurs désignés du désir de paix. Ce désir n’est pas l’expres— sion d'un sentiment de faiblesse.Laseulepaix possible est celle qui n’l1umilie aucun peuple. Elle doit comporter les conditions suivantes : 1“ création d’un tri- bunal d’arbitrage international obligatoire pour régler les conflits entre les difl‘e'rents états; 2° contrôle démocratique de tous les traités et arrangements inter— nationaux; 3” réduction des armements en vue d‘ar- river au désarmement général, 4° admission du droit de volonté personnelle de tous les peuples. » Les délégués déclarerent en outre. qu’à leur avis, le fait que les partis socialistes de tous les pays belligérants défendent leur pays et leur peuple, ne doit pas empêcher le maintien de leurs relations, non plus que la continuation de l’activité de leurs organismes internationaux. Signalons encore une conférence des femmes socialistes, convoquée par Clara Zetltin, a laquelle assis— taient des déléguées de toutes les nations, qui eut lieu a Berne vers la même époque. Elles indiqu‘erent a leur tour, comme condition de la paix : I° réparer les torts causés a la Belgique; 2° ne pas imposer de conditions humiliantes a aucune nation, 3° reconnaitre le droit des nationalités, petites ou grandes, à l’indé— pendance et à l’autonomie. Citons, pour être complet, une réunion socialiste internationale qui s’est tenue à Berne en septembre y assrsterent n etaient pas qualifiés pour représenter les parus ‘ ' nation ' aux.' Elle s ’ est entouree " du plus grand mystere et ses resolutrons n‘ont pas été publiées. CHAPITRE IV CONCLUSIONS Le moment semble venu de rechercher s’il n’est pas possible de déduire quelques conclusions des faits et opinions que nous venons d’examiner. Un premier point nous semble se dégager, avec la valeur d’une évidence: la doctrine socialiste n’a pas fait faillite, et toute accusation de ce genre, diri— gée contre elle par les réactionnaires, est absolument injustifiée. En efïet, les Congrès internationaux de Stuttgartde 1907 et de Copenhague en 1910, l’avaient définie comme suit: « Le devoir socialiste est de contribuer au maintien de la paix et d’empêcher la guerre par tous les moyens appropriés aux circonstances locales et d'accord avec le Bureau socialiste international. En second lieu, une fois la guerre déclarée, de faire tout pour l’amener à sa fin et hâter l’aHranchissement du prolétariat de la domination capitaliste. » Il est incontestable que, tout au moins dans leur première partie, ces instructions ont été fidèlement observées. Tous les socialistes ont fait, dans le monde — i16—— entier, le plus tenace ellort pour maintenir la paix et eviter la guerre. lit s’il faut se garder de l‘illusion de pretendre au monopole de la vertu, l’on peut tous cas, si elle est un argument pourla propagande, elle ne nous otÏre, au point de vue pratique et immédiat, aucune solution. affirmer du moins que l'influence socialiste a ete, dans ces dernieres annees, la plus active et la plus importante de toutes les forces de paix. Le prolé— tariat n’etait malheureusement pas assez puissant pour être le maitre de la situation, et toute sa bonne volonte s’est trouvee inellicace. Si l’on veut bien remarquer que l‘ Église catholique s’est trouvee egalement impuissante a empêcher la guerre, en dÇpit d’une organisation autrement ancienne et autrement considérable que celle du parti En second lieu, l’accord paraît également exister sur la réprobation de la violation de la neutralité belge. Les socialistes allemands eux—mêmes ont reconnu que cet acte était contraire a la justice, sans oser déduire, il est vrai, de cette opinion les consé— quences qu’elle comportait. Ce sentiment general nous permet de préciser, dans l‘ordre iiiiiiiediztt et pratique, une première condition que les socialistes du monde entier devront mettre a la conclusion de la paix, sous peine de ne plus pouvoir, en s’y oppo- socialiste, on constatera, du même coup, la vanité des sant, se réclamer de l‘ideal socialiste : la reconnais— accusations réactionnaire-s. Elles ne pourraient avoir de sens que si les socialistes, au lieu d’être des minorités, avaient été les maîtres dans les États belligérants. Et chacun est bien convaincu que, dans ce sance de l’indépendance de la Belgique. Cette constatation en amène une autre. Si l‘agres— sion de la Belgique a ete injuste, ses consequences dommageables doivent être réparées. Que sera cette cas, la guerre n’eût point éclaté. Ceci constaté, voyons maintenant quelles sont les idées qui, au milieu de ce tumulte de sentiments divergents et contradictoires, paraissent se retrouver chez tous les socialistes, dans toutes les nations. Ils sont tous d’accord pour attribuerles causes profondes de la guerre a l’organisation capitaliste, aux compé— titions d’intérêts pour la conquête des marchés du monde qui en sont la conséquence fatale. Cette unanimité n’est peut—être telle, avouons-le, que parce qu’elle est d’un ordre général et bien vague; et. en réparation ? Il ne serait point inutile de le décider le plus tôt possible afin de se rapprocher du maximum de ce que réclame l’équité et de ne point se conten— ter de solutions improvisÇ-es. Il sera malheureuse— ment toujours impO>>lble de restituer les vies per— dues et de compenser les chagrins éprouvés. Mais tout ce qui peut s’évaluer en argent doit faire l’objet d’une indemnisation. On peut prevoir que l’énormtté fabuleuse des destructions dont l’estima— tion provisoire depa>se a l'heure actuelle dix mil— liards, rendra presque impossible à l’Allemagne la _— I I 9 _.…_ —— 115 reparation prompte et complete du mal qu’elle a tion qu’il n’y eut point d’annexion. Il suivait, en cause, Des lors, il conviendrait de rechercher, des a Cela, latradition glorieuse de Bebel et de Liebknecht, protestant, en 1871, contre l’annexion de l’Alsace- present, d’autres modalitÇs d’indtninisation. On a de‘ifi parle de compensations territoriales. le suis per— suade que la tres grande maiorite des Belges et spé— cialement des socialistes serait absolument opposee a cette solution. Il faut donc chercher dans d’autres directions. Le cas de la Belgique nous permet d’atteindre, par vo;e de consequence. un point de vue plus général. .\i la violation de la neutralite belge est une injustice, si le sentiment socialiste du monde entier doit exi— ger que la Be’eique recouvre son independance et sa pro.»perité, c’est non seulement parce que cette indépendance etait garantie par des traités, mais c’est surtout parce que la nation a manifesté, d’une façon héroïque, le prix qu’elle attachait a son indépendance et a sa liberté. Les peuples, même petits, ont seuls le droit de disposer d’eux—mêmes, et la force brutale qui veut les incorporer dans un Etat plus grand. constitue une indigne oppression. Nous œmxgnons ainsi une doctrine socialiste universelle— ment acceptée. Et, encore une fois, nous constatons la quasr—unanimite des partis socialistes du monde sur la nécessité de reconnaitre les droits des nationalit , e’s. Haase, le leader socialiste du Reichstag,a declare, au nom des socialistes allemands eux-mêmes, & —’l 3'Oïlï 19I.1, que le groupe parlementaire ne con— sent-art a voter les crédits de guerre, qu’à la condi- Lorraine, et de Karl Marx, prédisant alors avec une perspicacité singulière, que cette injustice conduirait fatalement a la confiagrarion européenne d’aujour— d’hui. On parle souvent de refaire, a la lin de la guerre, une Europe nouvelle. Pour les socialistes, cette reconstitution de l’Europe ne peut pas être aban— donnée au caprice et a l’intérêt des dynasties, des diplomates et des classes dirigeantes. Elle ne peut consacrer aucune violence, aucune servitude, aucune humiliation. Elle doit être l’œuvre des peuples et de la liberté. Par quel moven pratique arrivera-ton au résultat souhaité ? A quels indices reconnaitra—t-on les fractions éparses d’une même nationalité ? Est-ce l’élément géographique ou l’élément linguistique ou quelque autre qui servira a déterminer les frontières? N’y a—t—il pas lieu de considérer plutôt connue élément prédominant la volonté commune qu’ont divers groupes humains de vivre sous les mêmes lois? Mais comment constatera—t-on cette volonté? Voilà toute une série de questions, délicates et pourtant importantes par leurs conséquences, sur les— quelles il serait bien utile d’établir, entre les divers partis socialistes du monde, une certaine commu— "—IZI— N naute de vues. si l'on veut qu‘il _v ait encore « un » socialisme. Enfin. il parait _v avoir egalement accord sur cer— taines mesures qui devront Ctre réclamées par les socialistes. soit lors de la paix prochaine, soit au lendemain de cette paix : t° Suppression de la diplomatie secrete ; Réduction des armements; _; Précautions contre les fournisseurs militaires; 4“ Règlement des contestations internationales, par voie d’arbitrage. Ces diverses questions, dont on retrouvela préoccupation chez presque tous les socialistes, ne sont guere indiquées par eux que comme des souhaits, des directions. Mais elles manquent partout d’études détaillées. Il est incontestable qu’un peuple libre a le droit de connaître les traités et les arrangements qui, a un moment donné, peuvent disposer de son avenir, de la vie et de la fortune des citoyens, de la richesse nationale. C’estdonc très légitimement que les socialistes, et notamment les socialistes anglais et allemands, se plaignent du mystère dont sont entourées les relations diplomatiques. Une angoisse analogue a troublé aussi le socialisme italien. On peut donc raisonnablement exiger que l’opinion publi que ne soit plus tenue dans l’ignorance des engageme nts internationaux. Mais il reste a savoir, cepen dant, comment pareille publicité pourrait être organisée sans inconvénient. En ce qui concerne la réduction des armement s, le voeu est de même hautement louable, mais la dif— ficulté paraît très grosse, des qu’il s’agit de réalisatio n pratique. Pareil désarmement ne peut être que simultané. Et ce que peuvent faire les nations les plus avanc ées est nécessairement conditionné par ce que conse ntent a faire ou que sont forcées de faire les nations les plus arriérées, vis—à—vis desquelles il n’est pas possi ble de renoncer à se défendre. Il n’est pas niable que dans les circonstances actuelles, le militarisme le plus menaçant soit celui de l’Allemagne. La mesure dans laquelle le voeu socialiste pourra être satisfait dépendra donc de la mesure dans laquelle le militarisme allemand sera vaincu. On peut être certain que si cette défaite est suffisamment complète, les Alliés songeront, d’eux—mêmes, a réduire leurs dépenses militaires afin de réserver leurs forces économiques pour les œuvres de paix. C’est encore a bon droit que les socialistes de— nona—nt le scandale et le danger des spéculations sur les fournitures aux armées. Il est évidemment mons— trueux que certains capitalistes aient un intérêt direct àla guerre et réalisent des fortunes au milieu du deuil et de la ruine de tous. L’influence de ces gens-là ne peut être que perni— cieuse, et elle l’est d’autant plus que, comme ils dis« posent de fortunes considérables, il leur est relative— ment aisé de corrompre la presse et d’induire en »— t:: »— erre=cr l\ipini0n publique et les ;:ouvernements. ll 5eî'.1ll\îliîl.ill't dtliminei' ces elements de trouble, mais. encore une lois. on ne voit pas bien comment on pourrait _v arriver eliectivement. On a proposé l‘ét.itlsiititiii te ces industries et de ces connnerces et peut—Ctre v a-t—il. en ellet, dans cette direction, quelque clro>e dirtile a tenter. linlin, la doctrine socialiste ne peut se llatter de l'illusion de Faire disparaitre toutes contestations internationales. .\lais elle propose de les régler, non plus par la force barbare des armes, mais par le pro— cede plus civilisé de l‘arbitrage. Fort bien, mais qui ne voit que, sur ce point encore, il ne peut être sutti>ant de se contenter d‘un voeu platonique. Pour que l‘arbitrage puisse remplacer la guerre, il faut qu'il soit obligatoire et que ses sentences puissent, au besoin, etre exécutées. Sa force morale est évi- demment une influence importante et suffira dans la plupart des cas. Mais il faut nécessairement prévoir des cas extrêmes ou la contrainte sera indispensable. Et, de; lots, nous aboutissons a la nécessité de la constitution d‘une lorce internationale, c’est—à—dire à une position exactement opposée a celle du neutra— lisme diauiourd‘liui. Et, sur ce point encore, il serait bien utile que les diH‘érents partis socialistes du monde se missent d’accord sur une doctrine unique. . . , . _ Il reste a. dissiper une equrvoque sur ce qu >-il faut entendre quant au second devoir indiqué par les Congrès internationaux : « une fois la guerre décla— rée, faire tous ses etlorts pour hâter la conclusion de la paix >). C’est ici surtout qu’il faut distinguer entre le mot et la chose. Ceux qui veulent sincèrement la paix doivent la vouloir durable et définitive. L’énor— mite' même de cette guerre exige qu’en sorte une ère de paix prolongée. Tout arrangement précaire et transactionnel nous exposerait a voir recommencer le tragique conflit après quelques années de répit, permettant aux adversaires fatigués de récupérer leurs forces. Toute paix de ce genre pourrait s‘appeler la paix, mais elle n’en aurait que le nom. Il en résulterait de nouveaux armements et un militarisme uni— versel. Ce ne serait qu’une trêve en attendant de nouvelles luttes. Elle aurait, en outre, la tare essen- tielle de consacrer les avantages que la brutalité de son agression a concédés à l’Allemagne. Elle serait aussi injuste que dangereuse. Telles sont les raisons pour lesquelles les socialistes de France et d’Angle— terre se sont montrés nettement opposés a tout examen prématuré des possibilités de paix. Telles sont les raisons pour lesquelles ils ont accueilli avec méfiance les démarches des socialistes des pays neutres et notamment celle du député Morgari, en avril 1915, au nom des socialistes italiens. A leurs yeux, toute discussion d’une paix éventuelle ne leur parait qu’un moyen détourné d’aider l’Allemagne a profiter de la situation que lui donnent actuellement les opérations militaires. Libérer les territoires enva- his est une question préalable a toute étude des con—ditions de paix et pour cette libération, comme pour l’écrasement du militarisme, l‘eliort maximum est mands non inféodés a l’impérialisme, les conditions de la paix, il faudrait donc s’assurer, non seulement de leur sincérité, mais surtout de leur influence requis de chacun et ce serait l‘allaiblir que d’admettre auprès de leur gouvernement. actuellement un débat quelconque sur les conditions de la paix. Lorsque les socialistes de Belgique, de France et Il importe de noter ici une difl‘érence de situation d‘Angleterre déclarent qu’ils veulent la réparation extrèmement importante entre les socialistes des empires centraux et ceux des pays alliés. Les uns et les autres déclarent qu‘ils veulent la réparation de l‘injustice commise envers la Belgique, l‘abstention de toute oppression d‘un peuple et la reconnaissance du droit des nationalités. Mais les socialistes germains se sont associés ;‘1l’agression de la Belgique et de la Serbie et s‘ils ont, parla suite, proclamé, du tort causé à la Belgique, la reconnaissance des nationalités et la réduction du militarisme, ils ne parlent point autrement que les chefs de leurs gou— Du côté des Alliés, la situation est toute dilÎe'rente. vernements. MM. Poincaré et Viviani, MM. Asquith, rationalités, ils ne Grey et Lloyd George, ont, a de nombreuses reprises, affirmé leurs intentions à cet égard. De telle sorte qu’il est bien évident que c’est la victoire des Alliés qui seule peut assurer, dans une large mesure, les désirs exprimés par le socialisme international. semblent point avoir fait un efi‘ort quelconque auprès de leur gouvernement pour faire triompher ce prin— socialistes, doivent donc souhaiter la défaite de leurs cipe. Au contraire. En tous cas. et s’ils ont fait un impérialistes. En tant qu’ils les approuvent et les son— elïort quelconque dans ce sens, il a été sans aucun tiennent, ils s’excluent du parti socialiste, et la nou- résultat appréciable. Nous attendons toujours une parole bienveillante de l’Autriche vis—à-vis de la Serbie, une parole réparatrice de l’Allemagne vis—à— vis de la Belgique. Ceux qui dirigent la politique allemande discutent, au contraire, les conditions de velle Internationale se reformera, purifiée : l’epreuve, sans ces éléments infidèles. non sans réserves, le droit des l’annexion de la Belgique et déclarent, bien haut, qu‘il ne peut pas être question d’abandonner ces territoires conquis au prix de tant de sang allemand. Avant d’accepter de discuter avec les socialistes alle— Les socialistes allemands, en tant qu‘ils sont restés par ANNEXES DEUX ARTICLES SUR L’INTERNATIONALE PARUS DANS LE SECOLO DE MILAN ET L'INDËPENDANCE BELGE DE LONDRES. QUE RESTE—T—IL DE L’IDÉE DE L’INTERNATIONALE? Les événements actuels nous montrent la néces— sité de clarifier, sinon de reviser la notion que nous avions de l’Internationale. Cette nécessité s’impose particulièrement au parti socialiste, qui avait fait de l’Internationale une de ses idées fondamentales. Sans qu’elle ait jamais été très précisée, une théorie s’était formée dans les milieux révolutionnaires et s’était fait accepter petit a petit, faute de discussion, comme un dogme. Selon elle, la question de la pro— duction et de la répartition de la richesse résume tout le problème social. Certains privilégiés (les capitalistes) détenteurs des moyens de production, exploitent le reste de l’humanité (les travailleurs) selon un rythme sensiblement analogue partout. Il est dès lors indifîérent pour ce travailleur d’être ex— ploité par l’un ou l’autre patron; et, par conséquent, l’union seule des prolétaires de tous les pays pourra déterminer la fin de l’exploitation capitaliste. La fraternisation de tous les exploités s’impose, avec la suppression des frontières, et l’idéal d’un régime unique, donnant à chacun le produit intégral de son travail. Pareille argumentation sert de texte a de gros volumes, a des centaines de discours, à des milliers —123-—— d articles de journaux. Or. les circonstances sans la denienin tout a tut. en Hinn',1ç…p egarus. le vide et liiis‘ullisginqe. ll ne peut teux qtie cette theorie dont le verb.ilisnic presentes ;, Ç………g etre dou— simpliste vers la liberté; elle fait successivement les révolutions qui sont son honneur. il n’est donc pas vrai que la question du salaire soit pouvait etre accepte en temps de paix, n’ollie aucune solution $.111\l111\.1111t' aux que»tions an.;oiasantes que suivant tel ou tel mode. Ces modes ont au contraire . ; ' ‘ V ’ - ’ " > ‘ ’ " nous posent les evenements daniont‘dliui. lit. connue il laut, lorsqu’on raisonne. acconiniotler les raisonne— ments aux laits. et renoncer :] l’absurde pretention des sectant-s qui veulent acctnnntmler les laits a leurs systemes. il devient maintenant necessaire d’exami— ner les points faibles de la theorie. et en quoi elle devrait etre rectiiiee on cotni‘letee. . L’erreur du point de depart est lin portance exclusive donnee a la question de salaire. Cette impor— tance est evidemment considerable, mais elle n’est pas untque._ll tant au contraire reconnaitre qu’elle decrort au lur et a iiieStii'e que la civilisation auû— mente. Pour le primitif, dont le besoin essentiel est dassouvrr sa faim (et malheureusement, un <trand nombre d’hor unes, au xx‘* siecle, en sont encore là), 1ln_v a pas d’autre question, c’est clair. Mais quand le ventre est satisfait, naissent d’autres besoins. Et l’on peut meme dire que lorsque la subsistance est assu— ree, les besoins nouveaux paraissent les plus impé— r1eux. Après avoir conquis son pain, l’homme con— quiett la liberté. Et certains sont plus desireux encore de liberte que de pain : en quoi ils se ditÎérencient des animaux. ‘ Plus l’homme s’Gloigne de la bête ou de l’esclave a qui suffit la pitance quotidienne, plus cet amour, cette volonte de liberte grandit. On ne l’obtient que par la force, et souventdans le san<r. Ni les douleurs, ni les sacrifices ne font hésiter l’lîumanite‘ en rOuî€ l’unique, qu’il soit indifférent pour l’exploité de l’être une importance telle, que souvent l’exploité donnera sa vie pour qu’il lui soit permis de choisir, pour con— server ceux qui lui offrent des satisfactions relatives, pour repousser ceux qui lui font horreur. Et comme la langue, la religion, la politique, sont, dans leur diversité, des conditions d’existence aux— quelles les travailleurs attachent (l’histoire le prouve à chaque page) une importance essentielle, voilà brus— quement posé le problème des nationalités. Le résoudre, en supprimant les nationalités, a quelque chose de puéril. Les nationalités sont un des grands faits modernes, et l’on ne fait pas dispa— raître un fait en le niant, en le négligeant, ou en souhaitant simplement qu’il n’existe pas. Vouloir que tous les peuples se confondent en un seul, c’est évi- demment vouloir l’impossible. On pourrait répondre que l’impossible d’aujour- d’hui peut être le possible de demain, et qu‘il ne faut pas abandonner un idéal parce que sa réalisation parait lointaine. Soit ! demandons-nous donc si cette fusion internationale est un idéal? je n’hésite pas a répondre que non. Non seulement elle est chimérique, mais elle n’est pas souhaitable. Elle ne pourrait être acquise que par une concentration qui serait une des formes les plus insuppor— tables de l’oppression. Ptolétaires de tous les pays, unissez-vous. C’est parfait. Mais s’il laut sous—en— tendre : unissez-vous sous la domination allemande, nous n’en voulons plus. Nous concevons donc l’utilité de l’union, mais nous ne l’acceptons que sous -— 130 _\ réserve de notre liberté. Nous admettons une actio n commune, suite d'une discipline librement consen— tie,’mais nous entendons rester maitres de nos des- t1nees. _ Les nations, quelqu‘imparfaites qu’elles soient ins— L’INTERNATIONALE DE DEMAIN trtuées aujourd’hui, apparaissent aux peuples la con— dition indispensable de l'exercice de cette liberté. Ï\ous les voyons les défendre avec furie. Et avec raison. Parce que ce_qu’ils défendent ainsi ce sont des communautés de façon de sentir, de vivre et de pen— ser, formées soit par la race, soit par la langue, soit par la religion, soit par les souvenirs d’un passé commun, sort par la similitude des conditions écono— miques, soit enfin et surtout par la volonté de vivre ensemble. Et il est bon, il est indispensable si l’on souhaite que soit garantie la liberté, que cette diver51te des conceptions humaines sur la manière d’être heureux puisse être pleinement satisfaite. L’unifor— mrté est un rêve néfaste de théoricien. _ Il faut laisser aux collectivités humaines toute licence de développerleurs originalités particulières. Elles comprendront d’elles—mêmes, spontanément, lutilrte, pour certains Objets, dans certains domaines, dententes et de conventions. Et nous en revenons a_1ns1 a la notion vraie de l’Internationale (inter—national) qui, par définition même, comporte l’exis — tence préalable des nationalités. Et l’on voit mieux alors la grandeur des consé— quences de la guerre présente : elle nous mènera —ou bien (ce qui ne paraît pas probable) à l’hégémo— n1e despotrque d’un peuple souverain par la Force, — ou a une Fédération des Etats-Unis d’Europe la Liberté et le Droit. Quel est le socialiste qui par pour_Ta1t. declarer que ce formidable dilemme le laisse mdrHerentr J’ai essayé de montrer, dans l’article précédent, l’insuffisance de ce qui est accepté couramment comme la théorie socialiste de l’Internationale et d’indiquer comment, en tenant compte des faits, il faudrait reviser et compléter cette théorie. Les trois points principaux de cette revision pourraient se résumer ainsi: reconnaissance des nations, autono— mie, fédération. Ce n’est évidemment pas dans l’es— pace restreint d’un article d’un journal qu’il est possible de donner sur ces points les justifications néces- saires, mais on peut tout au moins tenter d’esquisser quelques indications générales. Le phénomène de l’existence des nations n’est pas contestable. Et les événements terribles que nous traversons suffisent à montrer le rôle capital que joue ce phénomène dans l’évolution humaine et l’impor— tances que les hommes y attachent. Entendons bien que je ne désigne pas par le mot : nation, les Etats souverains. Un Etat est une organisation politique qui peut parfois correspondre à la nation, qui devrait y correspondre, mais n’y correspond pas toujours. Il est des Etats, comme l’Autriche par exemple, qui sont une mosaïque de nations. Il est des morceaux de la nation qui sont en dehors de l’Etat, la Lorraine en France, le Trentin en Italie par exemple. Les Etats sont formés au hasard des combinaisons poli— tiques, des résultats des guerres ou de l’ambition des rois. Les nations sont formées des affinités histotiques, religieuses, linguistiques, économiques que ___ 122 ,… certains hommes ont entre eux. Il faut reconnaitre, comme une des formes de la liberté, a ceux qui le désirent, le droit de vivre en commun, et il faut leur permettre le développement maximum de leurs compréhensions particulieres. Il faut reconnaitre et préciser pour les peuples comme on l’a fait pour les individus le droit a la vie et a la liberté. Pareille théorie condamne donc les conquêtes et les annexions et lai—se les peuples juges de leur avenir. Ceci nous amene Ç1 concevoir l’autonomie comme un aspect complémentaire du principe des nationa— lités. l’ajoute même qu’il faut l’entendre d'une facon très large et l’organiser de telle sorte qu’a l’intérieur des Etats ou des nations, tout groupe humain avant une notion spéciale de son bonheur puisse lui don— ner satisfaction. Les provinces ou régions, les villes, les communes, les associations doivent avoir des règles particulières d’existence. Il n’y a pas de liberté véritable dans une Centralisation excessive. Assu= rement, la centralisation et l’unification ont été, ou a la liberté linguistique de certaines minorités. Il faut donc favoriser, autant que possible l’autono— mie pour accroître d’autant la liberté véritable. Comment ? En s’inspirant avant tout des faits, en n’oubliant jamais que les hommes sont différents selon les milieux ou les circonstances, et que la meil— leure des législations est celle qui est assez souple pour permettre une adaptation adéquate. De même que les hommes sont petits et grands, gros ou maigres, et qu’il serait ridicule de vouloir leur imposer à tous un vêtement identique. Parallèlement à ce mouvement de décentralisation et d’autonomie, il faudra poursuivre une action inverse : la fédération; permettre aux groupes de se grouper et de s'entendre, aux régions de se fédérer, aux nations de s’internationaliser. Ce sera la triche des sociologues et des hommes politiques de déter— miner ce qui est d’intérêt communal, régional, natio— nal, ou international. Des traités interviemlront. Et comme ces traités seront la base du développement et du progrès mondial, il faudra qu’ils soient res— pectés. De même que l’on a conquis le respect du droit des individus par l’organisation d’une magis— à certains moments de l’histoire, une forme de progrès. Mais c‘est un stade provisoire dans l’évo— lution des peuples. Nous en sommes arrivés presque partout en Europe, a l’instant où après avoir compris les bienfaits de certaines centralisations. nous aspirons a certaines décentralisations. Le régime parlementaire qui fait, soit dans les élections, Quand, dans la rue, un voleur ou une brute ass-aille soit dans les Chambres, triompher la loi du nombre, un citoyen paisible, on n’admettrait guère aujour— n’est qu’une forme atténuée de la tyrannie si les droits des minorités sont tenus pour néant. Certes, il faut bien que la majorité l’emporte, puisqu’il serait beaucoup plus absurde que ce fût la minorité qui dictait la loi; mais la majorité n’a toujours pas raison. Elle n’a pas raison, spécialement, lorsqu’elle porte atteinte par la violence, à la liberté religieuse trature et d’une police, il faudra organiser la sauve— garde du droit des nations. Ceci devra modifier com— plètement nos notions présentes de la neutralité. d’hui que les autres citoyens se déclarent neutres et laissent à la force le soin de terminer le conflit. Non. On comprend que tout droit violé dans un citoyen est une lésion du droit de tous les autres, et la Société intervient. Il faudra que la Société des nations intervienne de même pour réprimer les ambitions et les cupidités de l’avenir. Ce sera l’œuvre de l’Inter— nationale de demain. Et dans une Internationale ainsi comprise, il y a place non seulement pour toutes les actions écono— miques du prolétariat, mais il y a place aussi pour son action révolutionnaire et morale. Si le socialisme TABLE DES MATIÈRES se réduisait à la question du salaire, ce serait une assez misérable doctrine, et l‘on ne comprendrait plus le prestige qu’elle exerce sur les masses et sur l’élite. En France, lors de l’affaire Dreyfus, on a entendu des controverses analogues à celles d’aujourd’hui. Certains théoriciens farouches proclamaient que c’était une allaire de bourgeois, devant laisser indifiérents les travailleurs. Ils n’ont pas été suivis. Les travailleurs ont répondu qu’il ne pouvait leur être indifférent que fussent violées la Justice et la Vérité. A l’heure actuelle, il ne peut de même leur être ind1lïérent de voir violer le Droit et la Liberté. ET NOTES duellement, se décident en général d’après leur inté— rêt égoïste, il est vrai aussi que les foules se décident rialiste, mais il ne faut pas oublier non plus les fac— teurs idéalistes. Il y a la des actions et des réactions réciproques, et ceux qui, dans cette prodigieuse sim— plicité, veulent trop simplifier, partent souvent d’un peu de vérité pour tomber dans beaucoup d’erreur. PREMIER DANS LES PAYS BELLIGÉRANTS $)OOï]O\\—n.£;wpw faut noter, expliquer l’histoire au point de vue maté- PRELIMINAIRES... . . , . . . . . CHAPITRE C’est que s’il est vrai que les hommes pris indivi— surtout par des sentiments généreux et altruistes. Il LA LES SOCIALISTES GUERRE EUROPÉENNE . Belgique ................................... . France ..................................... . Allemagne ................................. Autriche—Hongrie ............................ . Angleterre ................................. . Russie .................................... Serbie ..................................... Italie ...................................... Bulgarie ................................... CHAPITRE 13 22 47 ;i 62 68 72 79 II DANS LES PAYS NEUTRES Observations générales .......................... r. Hollande ................................... 2. Danemark .................................. 81 88 93 OO\I Q\qu ;. u« __ IËÔ __ Suède ...................................... 95 . Norwège… . . . ............................ . Suisse ........ 96 . Espagne . . _ . .. ....................... Portugal ............... . . . ‘ ........... Roumanie ............................... CHAPITRE III LES CON FERENCES INTERNATIONALES .................. CHAPITRE IV 1. CONCLUSIONS ................................... 2. ANNEXES. .................................... . MACOX, PKOTAT H!lîRhi. IWI(IMHUR& 97 101 101 101 .4. ZS. î .., .…H . .. . : .Il..q..ÈwË‘ …! — ‘ u.d1:.? !YPâÏ‘ÀMÊÎÈFZ S):1xŸiëïg: ! LAiflhRRh 1g)14»1…)13 æ-\a U”à URUKBLLHÏ i’î‘ P ARIS ( VÆMMEHQ' Êle La L‘RS |
Date | 1916 |
Type | Text |
Format | application/pdf |
Language | fra |
Rights Management | http://rightsstatements.org/vocab/NoC-US/1.0/ |
Holding Institution | J. Willard Marriott Library, University of Utah |
Scanning Technician | Jaclyn Martin |
Call Number | HX40 .D47 1916 |
ARK | ark:/87278/s6f23nzs |
Setname | uum_rbc |
ID | 1463364 |
Reference URL | https://collections.lib.utah.edu/ark:/87278/s6f23nzs |